La Préhistoire du feu est un sujet d'actualité et grâce aux progrès techniques, les connaissances des archéologues ont été profondément renouvelées. Pour autant, les débats restent vifs sur certains aspects essentiels, notamment celui de la date à laquelle le feu a pu être produit à volonté. Tout en reprenant les grands axes des travaux récents, la synthèse présentée ici sera résolument orientée vers une perspective technologique: innovation, diffusion de l'innovation, perte du savoir, convergences ou réinventions.
Soigner par le geste en Grèce archaïque et classique
En 2020, la pandémie de Covid-19 a révélé la puissance ambivalente des gestes médicaux, perçus tantôt comme salvateurs, tantôt comme intrusifs, voire violents. Ce paradoxe, loin d'être inédit, invite à un retour aux sources de la médecine occidentale: comment les Grecs des époques archaïque et classique pratiquaient-ils et représentaient-ils ces gestes?? Pour répondre à ces interrogations, l'étude d'Hélène Castelli porte sur les actions manuelles visant à soigner, qu'elles soient réalisées par des médecins ou d'autres acteurs, réels ou mythiques, et restitue à ces gestes médicaux toutes leurs dimensions?: technique, sociale et symbolique. Elle s'appuie sur des textes, images et récits issus du monde grec, datés entre le VIIIe et le IVe siècle avant notre ère, et contribue ainsi à historiciser la médecine grecque dans sa dimension pratique.
Les sociabilités créatives de l'École-laboratoire des Houches
En 1951, une jeune physicienne qui n'avait pas trente ans, Cécile DeWitt-Morette fonde, dans le village des Houches en Haute Savoie, une école d'été aux pratiques novatrices. Cette invention sociale va se révéler particulièrement adaptée à la nouvelle physique théorique – si déroutante et si exigeante – qui va se développer. Très vite, l'École de physique théorique des Houches s'impose comme une institution clé de la physique mondiale. Pierre-Gilles de Gennes, l'un des nombreux Prix Nobel à être passé par Les Houches, n'avait pas hésité à déclarer que l'École " a sauvé sa génération de physiciens ". Pourtant hors du cercle de la discipline, qui sait qu'un village de Haute Savoie accueille une institution légendaire de la physique? Ce livre explore, pour la première fois, avec des cadres sociocognitifs inédits, les fonctionnements et les effets qui ont valu à l'École des Houches un prestige planétaire.À travers les sociabilités créatives d'une École de montagne, on découvre que la science, elle-même, s'y invente autrement. Aux Houches, la science se donne à voir comme une confrontation à des inconnus et comme une bataille qui tente de mobiliser, participants et professeurs, vers de nouveaux " régimes collectifs de créativité ". On peut donc y observer, bien mieux qu'ailleurs, des mécanismes fondamentaux de la créativité scientifique et du " gouvernement " de la science.
Reproduction familiale et industrialisation (Ivry, 1770-1860)
Entre enquête sociologique et travail d'historien, Fabrice Boudjaaba revient sur un phénomène social démographique, celui de l'enracinement. En effet, alors que les migrations vers une capitale en plein essor sont de plus en plus fréquentes dans un XIXe naissant, qu'en est-il de ceux qui choisirent de rester dans leurs terres? L'auteur fait de ces sédentaires, ces Ivryens fidèles, le sujet de son enquête.Le xixe siècle est celui de toutes les transformations, celles du passage de l'Ancien aux nouveaux régimes, de l'industrialisation, des migrations et des mobilités géographiques et sociales, du basculement des campagnes vers les villes. En décalant la perspective, ce livre s'intéresse à ceux qui semblent vouloir échapper à cet emballement de l'histoire. Il interroge le comportement de ceux qui ne migrent pas. Ceux-là mêmes qui cherchent à perpétuer des modes d'existence préexistants aux bouleversements de l'industrialisation.À travers l'étude des vieilles familles paysannes d'Ivry, gros village qui devient en une génération la deuxième ville industrielle de la couronne parisienne, cette enquête analyse les comportements d'une population d'avant l'industrie. Comment fit-elle face aux migrations, à la concurrence de nouveaux acteurs pour la maîtrise du foncier? Cet ouvrage décrit les stratégies de ces enracinés sur plusieurs générations. De fait, nous trouvons dans leurs trajectoires le dessin d'une autre histoire de la banlieue et des identités.
L'évolution récente de la méthodologie des sciences sociales impose désormais à la recherche historique un suivi individualisé et multidimensionnel des acteurs et de leurs conduites au fil du temps. Il s'agit d'étudier des processus complexes, des agencements de comportements successifs, construits progressivement par chaque acteur, à travers tâtonnements, essais et erreurs. Une telle investigation implique l'utilisation de bases de données informatisées, permettant de transformer une masse d'informations issues de sources multiples en données exploitables. Les articles présents dans ce numéro explicitent cette opération de la plus haute importance, tant sur le plan épistémologique qu'empirique, en histoire et dans les sciences sociales.
L'actuelle cathédrale d'Amiens, dont la reconstruction a commencé en 1220, il y a 800 ans, est souvent présentée comme un " joyau " ou un " chef d'œuvre " de l'art gothique. Ces appréciations témoignent de son rayonnement, qui se mesure aux échelles locale, régionale, nationale voire européenne, et qui s'inscrit dans de multiples registres, depuis le Moyen Âge jusqu'à nos jours. Ainsi, la cathédrale est célébrée par des écrivains, chantée par des poètes, fréquentée par des pèlerins venus vénérer l'insigne relique du chef de saint Jean-Baptiste. Elle est aussi un modèle du point de vue de son architecture et de sa construction. Elle est enfin le siège d'un pouvoir spirituel et temporel, celui des évêques et des chanoines, avant que de nouveaux enjeux politiques, civiques, touristiques et patrimoniaux s'en emparent. La cathédrale d'Amiens rayonne ainsi auprès de ceux qui y prient, la regardent, s'en inspirent ou la pensent, à travers l'imaginaire, l'art ou l'histoire.
Au sein de nos sociétés contemporaines, les notions de réemploi, de réutilisation et de référence sont étroitement associées à des considérations écologiques et économiques. Pourtant, malgré leur apparente modernité, ces pratiques étaient déjà présentes dans l'Antiquité. À quelles préoccupations politiques, religieuses, économiques ou pragmatiques répondaient-elles ? Afin d'explorer la diversité des formes de réemploi et de réutilisation, ainsi que l'usage de la référence – qu'elle soit matérielle ou littéraire – cet ouvrage adopte une approche pluridisciplinaire et interroge une variété d'aires géographiques, chronologiques et culturelles. De la Perse achéménide à l'Afrique du nord, en passant par la Dacie et l'Ibérie du Caucase, huit contributions se proposent de mettre en lumière les motivations complexes menant à l'usage de ces pratiques dans les sociétés anciennes.
Cet ouvrage aborde la question de l'utilisation précoce par les sociétés anciennes du Nord de la France du charbon de terre dans l'artisanat et plus particulièrement la métallurgie du fer. Les opérations d'archéologie préventive depuis les années 2010 sur ce territoire ont permis de faire la lumière sur de telles pratiques. Les plus anciennes traces régionales retrouvées datent de la fin du IIe et le début du IIIe siècle. Néanmoins, c'est principalement durant tout le second Moyen Âge que cette pratique connait son expansion. Les problématiques qui ont découlé de ces découvertes ont abouti à un travail de thèse soutenue en 2020. Ce dernier a pu mettre en évidence les causes qui ont poussé ces sociétés anciennes à se tourner vers cette ressource énergétique. Cette recherche a également mis la lumière sur les différents réseaux d'approvisionnement. Enfin, elle s'est intéressée aux différentes conséquences (techniques, environnementales…) de l'utilisation de ce combustible fossile.
Dès le milieu du XVIIIe siècle, des formes nouvelles d'agriculture se développent, tandis que l'agronomie se construit comme discipline. Aujourd'hui, sciences, techniques et agriculture sont intimement intriquées, que ce soit dans l'agriculture productiviste, vivement critiquée, ou dans le développement d'agricultures alternatives.Cet ouvrage étudie les apports et les rythmes d'appropriation des sciences et techniques dans le monde agricole, les ajustements et les bricolages, les résistances et critiques face aux évolutions des pratiques et à leurs retombées sur l'environnement et la santé.
À travers deux brèves présentations des fonds "statistiques", conservés par les Archives nationales de l'outre-mer (ANOM, Aix-en-Provence) et par les Archives nationales du monde du travail (ANMT, Roubaix), et des articles d'historien·nes concernant des époques, aires géographiques et configurations politiques distinctes, ce dossier aborde: les enjeux des dénombrements de population et des classements qui en découlent, les usages du chiffre pour le contrôle du trafic de l'opium en Indochine, les ressorts d'une banque d'émission à la Réunion pendant la Belle Époque, ainsi que l'inégale diffusion des données financières en contexte colonial à travers le cas de l'Afrique-Équatoriale française lors de la crise du caoutchouc de 1913.
Un ingénieur entre la science, la politique et l'industrie au XIXe siècle
Léon Lalanne (1811-1892) fut un ingénieur des Ponts et Chaussées, un acteur de la révolution de 1848 et de la IIIe République naissante, et un savant expert reconnu pour son action dans le développement ferroviaire. Il participa aux révolutions après s'être converti à la République, a côtoyé les réformateurs sociaux, visité l'Europe en voie d'industrialisation, combattu l'Empire autoritaire, participé à la défense de Paris en 1870 avant de faire partie de cette génération de savants canonisés par la IIIe République en quête de légitimité. Cet ouvrage propose d'éclairer la trajectoire de cet inconnu en le replaçant au cœur des mutations industrielles et sociopolitiques du xixe siècle.
En 1834, David Johnston – négociant bordelais issu d'une famille irlandaise et maire de Bordeaux de 1838 à 1842 – décide de faire l'acquisition des anciens moulins de Teynac (ou moulins des Chartrons, quai de Bacalan), afin de convertir les bâtiments désaffectés en une manufacture de faïence fine et de porcelaine qui sera active jusqu'en 1895, date de la mort du dernier fils de Jules Vieillard. En 1840, Jules Vieillard, sollicité par David Johnston, était devenu Agent général de la manufacture bordelaise. L'histoire de la manufacture témoigne de productions d'une grande qualité technique et esthétique récompensées lors des grandes expositions nationales et internationales, mais elle fut aussi marquée par des difficultés financières dues à la concurrence et aux choix de fabrication trop coûteux. C'est cette histoire que ce volume retrace.Les textes réunis dans ce volume sont issus du colloque organisé les 9 et 10 juin 2022 au Musée des Arts décoratifs et du Design de Bordeaux. Ce colloque est le volet final d'un projet régional Nouvelle-Aquitaine piloté par l'Université Bordeaux Montaigne autour la manufacture Johnston-Vieillard. Ce volume rend compte de la pluridisciplinarité du projet; il couvre les champs archéologique, archéométrique, historique, esthétique et littéraire d'une approche régionale, nationale et européenne de la faïence.