Les dix-sept études ici rassemblées permettent d'envisager, à partir d'exemples typiques, depuis l'antiquité jusqu'à nos jours, des fables d'Ésope aux nouvelles de Borges, des lais de Marie de France à un roman éclaté de R. Pinget, de Gaspard de la nuit d'Aloysius Bertrand aux Phrases pour éventail de Claudel, certaines des stratégies et des significations de la brièveté. Là, comme dans les prologues de théâtre, les pièces en un acte, et aussi, pour une part, la fable, le miracle (Gautier de Coincy), ou le conte, dominent la considération pratique de la réception, le souci de s'accorder à l'impatience ou la fantaisie du public. Mais le bref ne se conçoit guère sans une esthétique. Malgré la diversité des postulations et des projets, on repère des méthodes similaires : l'ellipse, présente dans le récit lacu-naire du poème en prose, et, déjà, dans les silences d'histoi-res folkloriques du 16e siècle ; la discontinuité, qu'imposent l'impressionnisme de la notation dans le Journal des Goncourt, et plus encore les souvenirs inorganisés de l'autobiographie contemporaine ; l'art du démembrement, qu'il s'agisse du discours, pour l'ostentation spectaculaire d'un aphorisme, ou de la structure syntaxique, pour la sourde résonance des mots du poème. Quelques approches complètent ces analyses en dégageant tel modèle épistémologique sous-jacent à l'écriture des moralistes classiques, ou en étudiant des textes réflexifs, arts poétiques, théorie romantique du fragment.