Préface
Le 9 juillet 1966, l'Argentine commémore les cent cinquante ans
de son indépendance
L'opéra Bomarzo opus 34 d'Alberto Ginastera, sur un livret de Manuel
Mujica Lainez
L'affaire Bomarzo est une histoire de censure
Vicino Orsini, le duc de Bomarzo, le vrai, celui du XVIe siècle,
qui n'avait pas de bosse
Un autre bossu, Rigoletto, avait marqué la scène de Buenos Aires
à l'époque du centenaire
Alberto Ginastera a été joué au Théâtre Colón pendant toute sa carrière
Le roman Bomarzo, de Manuel Mujica Lainez
Le prélude commence par un trémolo de grosse caisse presque inaudible
Alberto Ginastera obtint une bourse Guggenheim en 1942
New York, 16 février 1967
Au Théâtre Colón, bleue comme l'azur du drapeau argentin est la voûte peinte en 1966 par Raúl Soldi
" Sexe dans le bel canto " (porno im Belcanto)
Six minutes quarante-trois secondes : c'est la durée des applaudissements
le 19 mai 1967
La dernière action de Juan Pedro Montero comme directeur général
du Théâtre Colón
La politique moraliste et répressive du régime d'Onganía est, au fond,
peu originale
Parmi les ironies de l'affaire Bomarzo
" Célèbre opéra exclu du programme "
L'interdiction de Bomarzo est saluée par certains avec enthousiasme
La conférence de Ginastera et Mujica Lainez, " Comment nous avons écrit Bomarzo "
Les militaires argentins évitèrent de s'ériger en critiques musicaux
Rapport confidentiel de l'ambassade américaine au département d'État
L'autre théoricien ne fut pas un censeur, mais Jorge Luis Borges
" Freud dit que l'instinct de mort est muet, est silence "
Deux pages du livre De milagros y de melancolías
La fidélité à Onganía dans l'affaire Bomarzo n'aura pas sauvé la tête
du colonel Schettini
I had a dream : après l'échec sexuel de sa nuit de noces
En février 1977, dans sa maison d'El Paraíso, Mujica Lainez commence
à travailler à son roman El Gran Teatro
" Pendant la dictature, le Colón fut une île "
Bomarzo, premier opéra argentin de la démocratie
" Bomarzo interdit à cause relations avec une ourse "
L'affaire Bomarzo : ainsi fut appelé par l'ambassadeur des États-Unis, dans ses dépêches confidentielles, le scandale qui a éclaté en juillet 1967 par l'interdiction de l'opéra d'Alberto Ginastera et Manuel Mujica Lainez, inspiré du créateur Vicino Orsini des célèbres jardins de Bomarzo (ou Parc des monstres), près de Rome. Soutenu par le général Ongania lors de sa création à Washington puis exclu par le même gouvernement en Argentine, Bomarzo reste à ce jour, pour la mémoire historique des Argentins, non pas l'opéra que certains ont vu, mais l'opéra que beaucoup n'auront pas pu voir. Et ce jusqu'en 1984, lorsque l'œuvre est reprise pour fêter le retour de la démocratie. L'histoire de cet opéra est devenue indissociable de celle de sa censure.En déroulant les différents fils de l'affaire – esthétique, politique, moral, culturel –, Esteban Buch nous plonge dans la création même de cette œuvre, et dans le contexte politique et social des dictatures argentines. Il nous fait revivre l'ampleur et la complexité du débat que suscita cette censure, la perversité des effets de moralisation de la vie publique, le rôle de l'Église catholique. Il livre ainsi une analyse fine et vivante des liens entre art, sexe, morale et État.Publié initialement en espagnol, la traduction de ce livre par l'auteur, argentin, revêt un sens à la fois personnel, scientifique, et politique.