Dossier critique
Sabrinelle Bedrane, Catherine Douzou : Voix minuscules, p. 5
Annie Saumont : Le Maître, p. 11
Johan Faerber : Ceux d'à-côté ou la nouvelle comme forme démocratique dans l'œuvre d'annie Saumont, p. 21
Yvon Houssais : Annie Saumont ou la langue comme elle va, p. 31
Agnès Cambrier : Dits et non-dits : la parole en question, p. 41
Corinne François Denève : Le Jardin d'acclimatation – Small is beautiful – Annie Saumont en traduction, p. 53
Marie-Odile André : Forme(s) brève(s) et édition : le cas d'Annie Saumont, p. 69
René Godenne : L'histoire de la nouvelle du XXe siècle et Annie Saumont, p. 79
Annie Saumont : Entretien, p. 87
Jean-Noël Blanc : À propos d'un tour de magie (où l'interdit provoque la liberté), p. 99
Marie-Hélène Lafon : Comment fait-elle ? Annie Saumont, p. 103
Mireille Diaz-Florian : Éclats de lire, p. 105
Annie Mignard : Annie Saumont, la voix, la plainte, le refrain, p. 107
Sabrinelle Bedrane : Bibliographie, p. 121
Annie Saumont fait parler les minuscules. Les voix sont celles d'exclus, de sans voix, précisément, de ceux que la société moderne infantilise, prive de parole et d'écoute. Elle fait parler des êtres fragiles, meurtris par leur enfance ou leur adolescence, frappés par la vie, cassés par ses drames, même si elle ne porte jamais de jugement moral, s'effaçant avec une grande générosité. Elle a l'art de faire croire, par une écriture simple en apparence, en réalité très élaborée, que c'est bien ce personnage qui raconte des bribes de sa vie. La nouvelle n'est pas linéaire, elle fait résonner le passé, l'événement catastrophique dans le présent, où il fait résurgence. Elle accorde également, précise Jean-Noël Blanc, une attention au minuscule, au détail, tant dans son écriture que dans ses traductions. Le penchant pour le monologue, chez elle, est une façon de récuser la notion de personnage. Jean-Noël Blanc livre ainsi quelques points permettant de pénétrer plus avant l'écriture d'Annie Saumont. Johan Faerber puis Agnès Cambier comparent le style d'Annie Saumont à celui de Nathalie Sarraute. Une sous-conversation spécifique à la nouvelliste est en outre analysée par Yvon Houssais qui convoque l'entrelacs. L'oralité, omniprésente, fait le lien avec les traductions d'Annie Saumont. Corinne François Denève montre que la traduction n'est pas éloignée de l'activité d'écrire et qu'elle lui a sans doute imprimé son style très particulier. Le traducteur disparaît devant un texte, se fond avec un auteur pour lui donner de nouveaux mots qui s'expriment pour lui, comme lui. Marie Odile André retrace le parcours d'Annie Saumont. Elle dit, tout comme l'auteure dans l'entretien qui clôt le présent volume, la persévérance dont il a fallu faire preuve pour faire paraître, d'abord, le premier recueil et pour continuer, ensuite, dans la voie des nouvelles sans jamais repasser par la case " roman ". René Godenne va dans le même sens en détaillant les différents modes de publications des nouvelles d'Annie Saumont. La palette des thèmes abordés est très riche et les nouvelles se situent en France ou dans le monde entier ; elles s'attachent à l'humain, qui est au centre de son travail, saisi sous toutes les lattitudes. La plupart des sujets sont lourds : suicide, inceste, viol, violences, morts violentes d'enfants, référence à la seconde guerre mondiale, à la Shoah. Mais il est aussi des sujets légers : humeurs d'une dame fortunée à l'égard de sa femme de ménage (" Allah est grand "), jeune fille qui se cherche (" La guerre est déclarée "), emploi du temps surchargé d'une mère de famille qui voudrait écrire (" La plus belle histoire du monde "). Dans ces textes, rien de dramatique mais Annie Saumont prouve qu'il n'y a pas de sujet léger, et, inversement, que même à propos de sujets graves, il peut y avoir des traits d'esprit, voire d'humour.Le volume comporte aussi des nouvelles inédites d'Annie Saumont, des interventions d'auteurs qui connaissent bien son travail, une bibliographie et un entretien avec l'auteure.