Au 18e siècle, entre Cambrai, Saint-Quentin et Valenciennes, prospère une manufacture de toiles de lin fin, les batistes et les linons que fabriquent des tisserands ruraux, les mulquiniers, incapables de vivre du seul travail d'une terre avare. Leur activité alimente le négoce de riches marchands qui, après avoir fait blanchir et apprêter les toiles écrues, les écoulent auprès d'une clientèle aisée, disséminée dans le monde entier. À la fin du siècle, alors que la mulquinerie entame son déclin, la laine et le coton prennent le relais et donnent au tissage dispersé un nouvel et vigoureux élan, complémentaire cette fois de l'essor des filatures mécaniques. Au temps des mulquiniers succède le temps des gaziers, des tisseurs et des tullistes. La multiplication des tissages mécaniques, n'entraîne pas la disparition immédiate des métiers à domicile, qui résistent, vaille que vaille, jusqu'aux années 1870-1880. Grâce à une riche documentation, cet ouvrage redessine le modèle de la proto-industrialisation en suivant sur la longue durée ses deux phases, d'expansion, puis de déclin face à la mécanisation.