Introduction de Frédéric Vesentini
Hervé Piant, " Des procès innombrables. Éléments méthodologiques pour une histoire de la justice civile d'Ancien Régime " ;
Bruno Aubusson de Cavarlay, " Des comptes rendus à la statistique criminelle : c'est l'unité qui compte (France, 19e-20e siècles) " ;
Laurent López, " Faire du chiffre " pour exister. Les gendarmes et les policiers au principe des statistiques judiciaires (1875-1914) " ;
Aurore François et Christine Machiels, " Une guerre de chiffres. L'usage des statistiques par les discours abolitionniste et réglementariste sur la prostitution à Bruxelles (1844-1948) " ;
Bastien Bosa, " Victimes ou criminels ? La transformation des modes d'interprétation de la sur-représentation des Aborigènes dans le système de justice pénal ".
Postface de Dominique Margairaz
La médiatisation des chiffres de la police et de la justice, et les guerres de chiffres qu'elle entraîne, ne sont jamais univoques. Au carrefour de l'histoire du droit et de la justice, de l'histoire sociale et des statistiques, ce volume aide à comprendre les débats sur les chiffres du crime, de la police et de la justice.Cette sur-représentation des statistiques ne sont pas propres à la France du 21e siècle. Parmi les premières statistiques officielles publiées, dès le début du 19e siècle dans certains pays européens, on compte celles des crimes et des procès.Leur production est tributaire de l'activité des policiers, gendarmes, procureurs et juges et de ses supports matériels, des registres au casier judiciaire informatisé : tout cela impose des unités de compte parfois difficilement compatibles entre elles. Mais le choix des catégories mobilisées, et surtout les interprétations des chiffres, dépendent aussi de ce que l'on veut faire de la statistique : parler du crime et des criminels, des délits et des délinquants, ou bien de l'efficacité de la police et de la justice ? Ainsi les résultats, jamais univoques, peuvent-ils faire l'objet de lectures multiples, voire contradictoires, par exemple dans le cadre de la concurrence entre police et gendarmerie ou des débats sur la réglementation de la prostitution. Le même constat d'une sur-représentation des Aborigènes parmi les personnes ayant commis des infractions dans un État australien a ainsi pu donner prise tant à des interprétations racistes qu'à la dénonciation d'un harcèlement policier sélectif.L'historien de la déviance comme celui de la justice gagnent ainsi à se pencher sur l'histoire des statistiques, pour comprendre ce que les chiffres peuvent ou ne peuvent pas nous dire. Mais que faire lorsqu'il travaille sur des périodes plus anciennes, pour lesquelles il se trouve directement confronté à l'énorme masse des dossiers de procès ? Si elle ne peut prétendre se substituer à l'étude en profondeur de chaque affaire, une quantification contrôlée aide par exemple à mieux comprendre les ressorts d'une justice civile à laquelle avait recours une bonne partie de la population de l'Ancien Régime.