Ténèbres empoisonnées ?

Cinéma, jeunesse et délinquance de la libération aux années 1960
Roxane HAMERY
Résumé
" Ténèbres empoisonnées "... L'expression employée dans les années 1950 pour désigner le loisir cinématographique et ses effets sur le jeune public dit bien la peur qui s'est emparée alors des spécialistes de l'enfance, qu'il s'agisse des éducateurs ou des professionnels de la justice des mineurs. En réalité, le cinéma, comme source de modernité, inquiète certains de ces spécialistes depuis longtemps, depuis son origine quasiment. Mais l'après Seconde Guerre mondiale va être marquée par une reviviscence particulièrement forte de ces peurs sociales anciennes car, au moment de la reconstruction, la jeunesse devient un sujet de préoccupation majeur, d'espoir mais aussi de crainte comme en témoignent les gros titres de la presse qui pointent sans cesse l'attention sur l'acc ... Lire la suite
FORMAT
Livre broché
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Date de première publication du titre 31 octobre 2017
ISBN 9782370290199
EAN-13 9782370290199
Référence 121547-42
Nombre de pages de contenu principal 400
Format 15.9 x 24 x 2.8 cm
Poids 911 g

Introduction

I/ Le cinéma, fait de civilisation ou fléau social ?

1/ Les dangers du cinéma : des fantasmes et hypothèses qui traversent le temps
L'héritage des recherches de Maurice Rouvroy
Les Payne Fund Studies : un modèle pour les recherches françaises ?
Les puissances du cinéma
L'amoralité des films
Prouver la menace

2/ Les jeunes, premiers spectateurs du cinéma : données quantitatives
Trois enquêtes sur le public juvénile
Le taux de fréquentation global
Le taux de fréquentation par âge et par sexe
Les autres critères influant sur le taux de fréquentation
Les différents modes de fréquentation

3/ Les goûts des jeunes spectateurs : données qualitatives
Les préférences des filles
Les préférences des garçons
La capacité critique du jeune public

II/ Les acteurs de la justice des mineurs face au cinéma

1/ Les magistrats confrontés à des délits liés au cinéma
La doctrine de la défense sociale : cadre des débats sur le cinéma
Les observations directes des juges : une approche pragmatique de la question du cinéma criminogène
L'enquête de 1948 menée auprès des juges des enfants : des résultats qui sont l'exception et non la règle
Qu'est-ce qu'un film dangereux ? la preuve par l'exemple

2/ Les difficultés de la grande enquête nationale de l'Éducation surveillée sur le cinéma et la délinquance
La lente élaboration de l'enquête nationale sur le cinéma : 1947-1948
Les évolutions des protocoles d'observation en 1948-1949
Les bilans de la partie sociologique de l'enquête en 1951-1952
Les bilans de la partie psychologique de l'enquête en 1952 et l'orientation vers le filmodrame
1959-1962 : vers une reprise des recherches ?

3/ De quelques enquêtes particulières sur le cinéma menées auprès des établissements d'Éducation surveillée
Enquêtes et militantisme : servir un discours propagandiste
Focus sur le public féminin (France/Belgique)
Une spécificité de goût française : étude du processus d'identification à Eddie Constantine

III/ L'essor des débats : les tentatives de coordination

1/ Une convergence de réflexions entre les professionnels de l'enfance et les recherches de la filmologie
La question centrale du jeune public : les enfants inadaptés, population représentative de la jeunesse ou cobayes d'exception ?
Les finalités ambiguës des recherches sur le public juvénile
Le champ des recherches filmologiques en Italie : une incursion du social et du politique plus assumée

2/ Parler d'une même voix : l'enjeu des congrès sur le cinéma et la jeunesse
Les cadres généraux des échanges et discussions : vers la constitution d'un réseau fédéré ?
Les orientations principales des congrès : de l'impossible délimitation d'un objet d'étude
Du congrès de Milan en 1952 à la fondation de l'Institut pour l'étude expérimentale des problèmes sociaux de l'information visuelle (ISPSIV) en 1960 : un renouveau des études sur la jeunesse et le cinéma est-il possible ?

3/ La rencontre du monde de la justice, de la filmologie et du cinéma
La part grandissante des recherches sur le cinéma dans les publications de criminologie
Des magistrats analysent la représentation du crime à l'écran et ses effets
Le positionnement complexe de la critique cinématographique

IV/ Dompter le vice, former les esprits

1/ Maxima debetur puero reverentia : la prévention légale et le cinéma
Renforcer l'encadrement légal du cinéma
Le durcissement de la censure et la réforme de 1961
Mais que pensent les détracteurs de la censure des nouvelles mesures de protection de la jeunesse ?

2/ " Le cinéma comme moyen de défense sociale dans l'éducation des jeunes "
Valeur prophylactique du ciné-club de jeunes et formation d'un goût légitime
Les visées du ciné-club en milieu fermé : vocation corrective et terrain d'observation privilégié pour l'enquête sur le cinéma et la délinquance
Les formules du ciné-club en milieu fermé
La formation cinématographique des éducateurs

3/ Le cinéma, reflet des maux de la jeunesse… de la justice et de l'éducation
Le Carrefour des enfants perdus : une représentation de la justice des mineurs et de la rééducation très critiquée
André Cayatte au banc des accusés
Demain il sera trop tard de Léonide Moguy, un modèle " contre les films déprimants "

Conclusion

Sources et bibliographie

Index des noms

Index des films

" Ténèbres empoisonnées "... L'expression employée dans les années 1950 pour désigner le loisir cinématographique et ses effets sur le jeune public dit bien la peur qui s'est emparée alors des spécialistes de l'enfance, qu'il s'agisse des éducateurs ou des professionnels de la justice des mineurs. En réalité, le cinéma, comme source de modernité, inquiète certains de ces spécialistes depuis longtemps, depuis son origine quasiment. Mais l'après Seconde Guerre mondiale va être marquée par une reviviscence particulièrement forte de ces peurs sociales anciennes car, au moment de la reconstruction, la jeunesse devient un sujet de préoccupation majeur, d'espoir mais aussi de crainte comme en témoignent les gros titres de la presse qui pointent sans cesse l'attention sur l'accroissement du phénomène de la délinquance juvénile. De là, il n'y a avait qu'un pas à franchir pour établir une corrélation entre l'expansion de cette forme de criminalité et le développement du cinéma, comme facteur d'influence direct ou secondaire.Toutes les caractéristiques du cinéma alimentent alors les inquiétudes. Le fait qu'il s'agisse d'un loisir qui se goûte dans la pénombre d'une salle, parfois située dans la périphérie des grandes villes ou aux abords de quartiers mal famés, que les jeunes aiment s'y rendre en bande ou pour flirter, que les films véhiculent des modes de vie bien éloignés des conditions réelles de la vie ordinaire avec leur lot de gangsters, de rebelles et de femmes légères, qu'ils agissent sur le psychisme selon des modalités que les psychologues ne parviennent pas à expliquer, provoquant chez tous, et plus encore chez les plus jeunes, un véritable " besoin " de cinéma.C'est au sein du secteur de l'Éducation surveillée que seront entreprises, dès 1947, les premières études dites scientifiques pour tenter de déterminer la part exacte du cinéma dans le phénomène général de la délinquance juvénile. Une grande enquête est alors lancée auprès des centres situés sur l'ensemble du territoire national, composée de deux versants, l'un sociologique et l'autre psychologique. Des ramifications se développent rapidement, au point que la question du cinéma devient une préoccupation centrale pour l'ensemble des spécialistes de la justice des mineurs. Ces travaux et ces discours constituent la matière centrale de cet ouvrage qui entend éclairer, grâce à une approche inédite, les composantes du débat sur le cinéma et la délinquance juvénile tel qu'il se posa, de la Libération aux années 1960.

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