Dès les premiers temps de la conquête, les agglomérations qui parsèment peu à peu sur l'immense territoire brésilien forment un élément fondamental de l'organisation socio-économique de la colonie. Les chefs politiques locaux, pour la plupart propriétaires de moulins, de mines ou de plantations de cafés, concentrent dans leurs fiefs une population dépendante qu'ils emploient et protègent tout à la fois. Ils s'imposent alors face au pouvoir central comme des intermédiaires aussi indispensables que redoutables. L'auteure montre dans le livre comment cette tension entre pouvoir local et pouvoir central devient une constante de la vie politique du Brésil, de l'époque coloniale jusqu'à la fin de la Première République (1930). Issue d'un texte plusieurs fois réédité au Brésil et bien connu des spécialistes sous le titre O mandonismo local na vida politica brasileira (Editora Alfa-Omega), la version offre au public francophone les éléments essentiels pour comprendre la formation et le fonctionnement de la société brésilienne.
A Brasília Teimosa (favela urbanisée de Recife au Nordeste du Brésil), la revendication de respect - catégorie du social érigée en catégorie du politique - renvoie aussi bien à une préférence pour les formes anciennes de rapports hiérarchiques qu'à une demande d'égalité singulièrement ambivalente. Car pour ses habitants, particulièrement affectés par la crise économique, la nature du régime politique importe bien moins que la reconnaissance de leur pleine appartenance à la société, c'est-à-dire à l'humanité, par opposition à ce qui évoque la condition d'esclave. Prendre cette péninsule comme unité d'analyse permet de mettre en relation des domaines habituellement séparés (l'étude des formes de vie et de la construction des identités, des associations d'habitants dans la mise en œuvre de l'intervention sociale et le fonctionnement du système politique municipal…). Il faut en effet connaître la fragilité des appartenances locales pour comprendre la faiblesse de la participation aux associations d'habitants, savoir l'importance accordée à la qualité des relations sociales pour saisir les modes de déchiffrement des activités politiques, et prendre en compte la prégnance de moments politiques fondateurs pour interpréter certaines représentations sociales. A partir d'une approche ethnographique du terrain, c'est un aspect de la figure concrète de la démocratie brésilienne que ce livre révèle.
Anarchisme et syndicalisme révolutionnaire au Brésil. Mythe et histoire
Un océan remué dans toutes ses vagues... Avec cette formule l'anarchiste Neno Vasco cherchait à définir la conception pluraliste de l'unité ouvrière embrassée par le syndicalisme révolutionnaire qui féconda la stratégie ouvrière d'action directe du premier mouvement ouvrier brésilien, du début du siècle jusqu'à la fin des années vingt. Sa richesse et sa dynamique s'imprimèrent et s'exprimèrent dans les pratiques ouvrières, dans l'imaginaire social et dans le ton anarchiste de toute cette époque. Les années vingt sont celles d'un changement profond, d'une rupture dans le mouvement ouvrier brésilien.
À São Paulo, la dégradation des conditions de logement populaire se poursuit, malgré la mise en place, à partir de 1964, d'un puissant dispositif d'intervention de l'État. La production de logements accessibles à la population à bas revenus se fait en dehors des normes légales, techniques et administratives dans les lotissements périphériques irréguliers : c'est un enseignement pour la reformulation des politiques de logement populaire, et un apprentissage du développement et de la démocratie.
Phénomène unique dans l'Amérique indépendante — mise à part la tragique et brève expérience du Mexique —, la monarchie brésilienne garantit, pendant cette longue période, la stabilité politique du pays grâce à un accord implicite et instable entre le roi et les propriétaires terriens : en assurant l'ordre social, le roi assure leur pouvoir ; en prônant des réformes sociales (comme l'abolition de l'esclavage), il blesse profondément leurs intérêts matériels. La vie politique présente ainsi des caractéristiques théâtrales ; là réside le secret de l'apparente stabilité du système et de sa réelle fragilité.