De la route ptolémaïque d'Edfou à Bérénice au réseau des praesidia romains
Ce livre explore les réseaux de circulation qui ont permis aux hommes de traverser le désert Oriental égyptien sur près d'un millénaire, entre la fin du IV? s. av. J.-C. et le début du III? s. ap. J.-C., en exploitant les résultats des fouilles conduites par la mission française du désert Oriental et des travaux menés par le projet ERC Desert Networks.La première partie retrace l'évolution de l'occupation du désert Oriental entre la période hellénistique et l'époque romaine, à travers l'étude de plus de 150 sites classés en deux grandes catégories: les sites routiers et les sites d'exploitation des ressources naturelles. Grâce à un modèle théorique adapté au pas du chameau et à la topographie de la zone étudiée, enrichi par l'expérience de voyageurs modernes qui ont traversé la région, les réseaux routiers de chaque période sont ensuite reconstitués, comparés et analysés. La singularité du maillage ptolémaïque, souple et adapté aux contraintes du désert, est mise en évidence pour la première fois, par rapport à un réseau romain dense, centralisé, mais également plus divers que généralement présenté.La seconde partie donne toute sa place à l'unique voie dotée d'une infrastructure routière à l'époque ptolémaïque, la route qui relie Edfou au port de Bérénice, sur la mer Rouge. À partir des données archéologiques et textuelles issues de la fouille des stations routières de Bir Samut et d'Abbad, l'autrice reconstitue la logistique des grandes expéditions de chasse lancées vers la Corne de l'Afrique par l'État lagide pour approvisionner son armée en éléphants de combat. Cinq phases expéditionnaires sont identifiées, entre le début des années 260 et la révolte de Thébaïde à la fin du III? s. av. J.-C. Le dispositif, remarquablement organisé, est fondé sur l'expérience égyptienne dans le domaine des expéditions transdésertiques, en même temps qu'il s'inspire du système des routes royales achéménides. Il inclut aussi des nomades, dont le savoir sur les ressources locales est mis à profit.En insistant sur l'occupation hellénistique de la région et ses spécificités, l'ouvrage renouvelle en profondeur notre compréhension des dynamiques d'occupation et de circulation dans le désert Oriental.
Le présent ouvrage est le fruit d'un colloque international qui s'est tenu en 2021 à la faculté des lettres de Sorbonne Université, à l'occasion du dixième anniversaire de la disparition du professeur Jacqueline Dangel. Il a réuni des spécialistes des littératures grecque et latine autour de la question des représentations du lecteur dans la poésie antique.C'est à la présence du lecteur et à ses relations avec l'auteur et à leur impact sur le texte lui-même que s'intéressent les différents articles ici regroupés, en s'interrogeant sur la pertinence, pour les corpus antiques, de certaines notions définies par Umberto Eco et l'école de Constance. Sont ainsi explorés les multiples visages du " lecteur empirique ", l'inscription dans le poème de la confrontation de ce lecteur empirique avec le " lecteur modèle ", la dialectique qui préside aux rapports du poète et du lecteur lorsque le second est impliqué par le premier dans le processus de création, la position particulière du lecteur dans des performances (théâtre, récitations) qui constituent, pour les Anciens, des formes de lecture, ou encore le statut de la lectrice, qui peut être représentée par un auteur ou par une autrice. Ces questionnements mettent à l'épreuve des théories de la réception des œuvres empruntées à des ères chrono-culturelles variées, depuis la Grèce archaïque et classique jusqu'à la latinité tardive, en passant par la latinité classique et impériale, avec une incursion du côté du néo-latin.
Contribution à une histoire de l'idée d'épopée d'Hérodote à Tzetzès
En Grèce ancienne, l'épopée, en tant que genre littéraire, a été en grande partie éclipsée par la place prééminente accordée au " divin Homère " dans tous les domaines de la culture. Modèle absolu, non seulement de toute forme de poésie, mais aussi de toute littérature, source de tous les savoirs, Homère est irréductible au genre épique. Or, la dimension d'autorité qui lui est conférée ne laisse guère de place pour d'autres poètes. En outre, contrairement à la tragédie ou à la comédie par exemple, l'épopée n'a pas de nom spécifique: elle est souvent désignée uniquement au moyen du terme poiesis, " poésie ", ou reçoit des appellations diverses liées au vers employé, l'hexamètre dactylique.Toutefois, un certain nombre de grammairiens d'époques impériale et byzantine remettent sur le métier les définitions de la poésie épique. Le présent volume prend le parti de se fonder sur ces conceptions tardives et retrace leur formation à partir des textes plus anciens. Hérodote, Platon et, bien sûr, Aristote proposent déjà des définitions partielles et partisanes, mais déterminantes pour celles qui suivront.Quelles sont les diverses appellations du genre épique? Comment est-il caractérisé? Comment les Anciens le conçoivent-ils au sein des genres littéraires? Analysant la formation des définitions du genre épique et donnant accès à un corpus de textes théoriques traduits ici pour la première fois en langue moderne, l'ouvrage, qui s'adresse aussi à un public non-helléniste, se veut utile à toute personne s'intéressant aux théories de l'épopée, et plus largement, aux théories des genres littéraires.
Attesté depuis l'Antiquité, le tirage au sort est une pratique dont l'histoire s'inscrit dans la longue durée. Dès l'Iliade et les autres épopées, parce qu'il reposait sur le hasard et l'intervention des dieux, il était opposé, philosophiquement et concrètement, au choix des hommes, que celui-ci fût fondé sur la raison et la délibération, le vote ou le bon vouloir personnel. C'est à cette procédure à la fois fréquente et commune dans le bassin méditerranéen antique que ce volume est consacré. Au travers de dix-huit contributions, il esquisse une réflexion collective sur les usages politiques, religieux, administratifs et ludiques qui étaient prêtés à la sors. L'enquête débute avec les mondes grec et italien des époques archaïque et classique et conduit le lecteur jusqu'à la Rome républicaine et impériale, espace et époques pour lesquels la sortitio n'a à ce jour pas reçu encore l'attention qu'elle mérite. En prenant le parti d'une démarche diachronique et comparatiste, ce volume cherche à mettre en lumière les différentes significations et vertus attachées au tirage au sort en fonction des régimes qui y eurent recours et de leur culture politique. Pourquoi les Romains, comme tant d'autres peuples antiques, choisirent-ils de laisser une telle place au hasard dans la conduite des affaires de la cité? Au-delà des enjeux propres à l'histoire ancienne, l'ouvrage s'inscrit dans une réflexion contemporaine. Il veille tout particulièrement à donner une profondeur historique et anthropologique au débat actuel sur la réintroduction du tirage au sort dans le contexte d'une crise de la " représentativité " que connaissent actuellement les démocraties occidentales.
La rivalité pour l'hégémonie en Grèce dans la première moitié du IVe siècle avant J.-C.
L'une des conséquences de la guerre du Péloponnèse a été le développement d'une politique navale à grande échelle de la part de deux puissances terrestres : Sparte et la Confédération béotienne. À l'époque de leurs hégémonies respectives (404‑371 et 371‑362 av. J.-C.), elles ont dû se tourner vers la mer pour contrer le pouvoir qu'Athènes y exerçait, en mettant ainsi fin à la répartition, ancrée dans les esprits, entre la puissance sur terre (Sparte) et la puissance sur mer (Athènes). Cette nécessité a conduit Sparte et la Béotie à s'adapter à ce nouveau contexte : la surveillance des lieux stratégiques et la guerre navale étaient désormais au cœur de leurs préoccupations.L'ouvrage propose d'examiner les modalités d'adaptation entre les contraintes liées à une puissance terrestre et la mise en place d'une politique navale. Quelles ressources en argent, en hommes et en matériaux étaient nécessaires pour la construction et l'entretien d'une flotte et de ports militaires ? Quels étaient la disposition et l'aménagement des sites urbains à proximité de la mer ? Quel était leur rôle dans le développement de la navigation ? De tels changements ont entraîné un nouveau type de contrôle des réseaux routiers et du territoire. La question de l'organisation hiérarchique de la flotte se pose également. Par ailleurs, le développement de lieux stratégiques dans le cadre d'une politique navale crée de nouvelles relations sur le plan international. À travers l'analyse de ces changements, ce livre montre comment des puissances terrestres ont pu développer une politique navale et jouer ainsi un rôle central dans le monde égéen.
L'érotisme féminin est l'un des thèmes les plus fascinants de la littérature antique. Cependant, les travaux qui s'y intéressent considèrent souvent la littérature comme une source à partir de laquelle reconstituer la réalité des pratiques et des mœurs du monde romain. C'est une perspective différente qu'adopte cette étude des représentations du désir féminin chez les poètes latins de la fin de la République au Haut-Empire : le désir féminin est observé en tant qu'objet construit et modelé par la littérature, qui doit avant tout aux codes génériques, à la langue poétique et à ses spécificités, ou encore à certains traits auctoriaux. La poésie est à la fois un espace de liberté et un espace de contrainte pour le sujet érotique : le poète joue avec les codes du genre et met en place des stratégies pour rendre la représentation du désir de la femme acceptable, dans un contexte culturel où il est condamné, voire nié. La forme poétique exerce une influence considérable sur la représentation du désir et ses modalités : c'est alors le processus de construction de cet objet par le poète que nous mettons en lumière. Cet ouvrage éclaire, dans une première partie, les différents types de condamnations de la libido féminine chez les poètes et les différentes représentations qui leur sont associées. La deuxième partie étudie l'exaltation du désir féminin et les formes qu'il prend lorsqu'il est chanté par des poètes masculins.
Quinze spécialistes de langues anciennes abordent dans le présent volume des questions variées sur la phonologie, la morphologie, la syntaxe, le lexique, l'onomastique, et la diffusion de systèmes d'écriture dans des contextes d'interrelations linguistiques. Leurs contributions explorent, d'une part, les influences du grec ancien sur d'autres langues et vice versa, et, d'autre part, les mécanismes qui déterminent les relations entre les divers dialectes du grec ancien. Ces deux regards complémentaires élargissent le panorama des études sur les contacts linguistiques dans la Méditerranée antique, en ouvrant de nouveaux sentiers de recherche par rapport à deux phénomènes qui sont fondamentalement parallèles.
Les principaux accès à l'orchestra et aux gradins dans les théâtres et les odéons grecs ou romains étaient partagés par les artistes comme les spectateurs. Essentiels pour l'usage des monuments, ils ont été en grande partie négligés dans la mesure où, comme tout passage, ils se définissent par un vide. Aucun ouvrage ne leur a été entièrement dédié. Aucune synthèse sur le théâtre antique ne comporte de chapitre qui en retrace l'histoire.Le présent recueil tente de combler une lacune en envisageant l'évolution de ces accès depuis la naissance du théâtre grec jusqu'à la mort du théâtre romain, du Portugal au Proche-Orient. Il comporte sept synthèses régionales et autant de présentations monographiques, regroupées en trois zones géographiques : l'Orient, l'Italie et l'Hispanie, les Gaules et les Germanies.Ces contributions témoignent de l'importance essentielle de ces passages dans le fonctionnement des édifices de spectacles antiques et la diversité régionale de leur configuration. Elles invitent à s'interroger sur la pertinence même de l'usage des termes " parodos " et " aditus " en soulignant les normes qu'ils véhiculent dans l'analyse architecturale.
Cet ouvrage rassemble les travaux de chercheurs qui contribuent à mettre en lumière l'intérêt de conduire des recherches archéologiques systématiques dans le cadre d'espaces funéraires en partie rupestres, occupés de l'époque hellénistique à la période islamique dans la moyenne vallée de l'Euphrate. Le site d'Apamée de l'Euphrate, maintenant immergé sous les eaux d'un lac de barrage, a été exploré entre 1996 et 1999 par des fouilles de sauvetage encore inédites, conduites dans la ville et les espaces funéraires autour du site. Ces dernières fouilles constituent le sujet de l'ouvrage: trente-deux tombes ont été étudiées, parfois de façon partielle, auxquelles s'ajoutent deux tombes relevées antérieurement. Malgré les difficultés inhérentes à ce type d'intervention, l'équipe a abordé ces contextes avec la volonté d'intégrer l'ensemble des données du terrain en appliquant une méthodologie pluridisciplinaire rarement utilisée dans les contextes funéraires moyen-orientaux, caractérisés par de nombreuses réoccupations qui souvent découragent les archéologues.Grâce aux données livrées par l'architecture, l'ensemble du matériel mis au jour, aussi modeste soit-il, sa répartition spatiale et, dans les contextes les moins perturbés, la stratigraphie, cette approche permet de proposer de nouvelles hypothèses. On peut suivre l'évolution de l'occupation du territoire sur la rive orientale du fleuve. Une chronologie est proposée pour des types de tombes bien connus dans la région, mais jusqu'à présent mal datés. Ces contextes ont également livré de nombreuses données sur la typologie de vases ou lampes de production régionale, sur les pratiques funéraires et leur évolution, ainsi que les liens entretenus par les populations de cette rive du fleuve avec les traditions locales, les apports anatoliens, grecs et occidentaux.