Identités d'un pays aux marges du Limousin et de l'Auvergne
" La Xaintrie, un pays (presque) imaginaire! ". C'est autour de cette manchette délibérément provocatrice de Jean-Paul Kaufmann qu'est né le projet d'un colloque appelé à questionner l'essence de cette entité de marge, fantaisie limousine d'outre Dordogne en Auvergne, ou aventure auvergnate en Limousin. Plus qu'un canton, moins qu'une région, Xaintrie, ou Saintrie, rime avec Transnistrie, cette république moldave et slavophone du Dniestr, reconnue par personne et toute en longueur.Issus d'horizons pluridisciplinaires, les auteurs ont interrogé cette identité locale à la fois résistante et diffuse, qui s'exerce en tension entre centralité villageoise et attractions périphériques. Géographes, historiens, historiens du droit, historiens de l'art, ethnologues, gens de lettres et acteurs du territoire ont croisé leurs grilles de lecture et confronté leurs sensibilités pour cerner la territorialité des processus sociaux et culturels que le " royaume intime " cher à Denis Tillinac est censé polariser.Formant une entité géologique cohérente, limousine du point de vue administratif, auvergnate par la spiritualité et son inscription dans la mouvance paysagère des monts du Cantal, la Xaintrie ne se laisse pas enfermer dans une interprétation très déterminée. Lieu de changement insensible, société autorégulée à l'époque moderne, cet " agrégat de périphéries " dépourvu de capitale ressortit à l'Auvergne pour certains aspects, au Limousin pour d'autres.Au travers de cette identité polymorphe de la Xaintrie, faite d'héritages partagés ou métissés, ce sont en définitive les tropismes des régions de marges qui deviennent perceptibles, c'est l'essence même du " pays " - en tant qu'entité rétive aux partitions géographiques linéaires comme aux formalismes administratifs et juridiques - qui sourd dans toute sa complexité et ses nuances.
Le paysage est un élément essentiel de l'identité limousine. Landes et résineux du plateau de Millevaches, frondaisons des châtaigniers, omniprésentes prairies, foisonnement des lacs, étangs et cours d'eau sont autant de marqueurs d'une région qui se proclame pays " de l'arbre et de l'eau ". Mais ces éléments paysagers ont tous été créés ou aménagés par l'homme. A ce titre, ils sont objet d'histoire, tout comme le rapport que les Limousins entretiennent à leur environnement. Les seize contributions réunies dans cet ouvrage interrogent les paysages limousins de différentes manières. Certaines s'efforcent de reconstituer l'évolution paysagère du Limousin à travers la question de l'occupation du sol depuis la plus haute antiquité. D'autres étudient le devenir de certaines cultures, qu'il s'agisse d'essences " phares " de la région, comme le châtaignier, ou de plantes longtemps tombées dans l'oubli comme le chanvre. Mais le paysage ne saurait se réduire à cette seule question. Le lecteur trouvera aussi au fil des pages des analyses sur la modernisation et l'embellissement du paysage urbain, sur l'histoire de l'environnement avec, notamment, la question de l'assainissement des villes et celle de la protection et valorisation des ressources halieutiques. Egalement, parce qu'il ne saurait y avoir de paysage sans le regard de celui qui l'observe, le livre offre un ensemble de réflexions sur la manière dont nos ancêtres percevaient leur environnement mais également comment notre propre société contemporaine envisage les paysages limousins, qu'il s'agisse de la présence sans cesse croissante de l'arbre ou du devenir du lac de Vassivière.
Le lac de Saint-Pardoux en Limousin a été créé en 1976 pour redynamiser la campagne haut viennoise qui perdait habitants et activités. Ce livre retrace l'histoire de la création du lac, sa naissance et sa mise en valeur touristique. Après en avoir livré la " carte d'identité " géographique, il en analyse l'évolution plus que trentenaire sous l'effet de processus naturels et humains, et quantifie les vitesses d'évolution du littoral et de la cuvette lacustre. Il rend compte de la nécessité de connaître l'environnement pour que l'utilisation d'un lac soit bien celle escomptée (touristique, ici), et intègre cette recherche dans la thématique de la gestion environnementale et du développement durable, dans un souci d'objectivité quant à la question de la pollution radioactive.Cet ouvrage, riche en illustrations et photographies, est autant destiné au grand public qu'au monde universitaire. Condensé réussi d'une thèse de doctorat, il parvient non seulement à faire passer un message scientifique, mais est aussi utile aux réflexions d'aménagement du territoire, à la prise de décision quant à la difficile cohabitation de multiples activités autour d'un lac artificiel, dont le tourisme n'est pas la moindre. Quelles sont les modalités de comblement de ce type de plans d'eau ? Sont-ils menacés et à quelle échéance ? Faut-il ramener du sable artificiel sur les plages lacustres chaque année ? Les travaux présentés ici apportent des éléments de réponse.
Une spécialisation bovine en pays de petite culture
Le Limousin est depuis longtemps une terre d'élevage. Cette activité s'est précocement orientée vers la commercialisation de bœufs gras destinés surtout à la capitale. Cette activité prend une telle ampleur au 18e siècle qu'elle constitue la principale ressource économique de la province. L'exploitation judicieuse des caracté-ristiques naturelles de celle-ci – forte pluviosité, abondance de l'herbe, irrigation des prés de fauche – et l'utilisation de produits locaux abondants et d'un faible coût – foin, raves et châtaignes – permettent aux éleveurs d'engraisser les bovins à l'étable durant l'hiver et de fournir ainsi la capitale pendant les mois où les autres provinces comme la Normandie ne l'approvisionnent que faiblement. Cette méthode permet au Limousin de s'insérer avec succès dans le plus grand marché du royaume et de devenir le second fournisseur de celui-ci en bovins. En se démarquant de la préoccupation primordiale du siècle – la production de blés avant tout – l'élevage bovin limousin fait ainsi figure d'une spécialisation agricole impliquée dans l'économie de marché qui contraste avec la représentation traditionnelle de la province souvent décrite à travers le prisme de la misère, de l'archaïsme de ses pratiques agricoles et de l'isolement.
Regards croisés sur la Vienne. Enjeux et perspectives
La Vienne, longue de près de 400 kilomètres est au centre d'une multitude d'intérêts aussi bien que de bon nombre d'interrogations.Les doctorants de l'Université de Limoges ont tenu à lui rendre hommage en se lançant dans l'exercice délicat d'une approche pluridimensionnelle. La Vienne n'est en effet pas qu'un simple cours d'eau séparant la ville de Limoges en deux. Elle est au contraire à la source de nombreuses initiatives et de problématiques : quelle est son histoire ? En quoi est-elle associée au rayonnement de Limoges ? Quels en sont les propriétaires ? Pourquoi est-elle un révélateur de vie et d'infini ? Autant de questions ouvertes auxquelles cet ouvrage tente de répondre de manière simple et accessible.C'est donc dans une perspective pédagogique que les auteurs de cet ouvrage tentent de dresser un aperçu, chacun dans son domaine de prédilection (sciences humaines ou techniques) des questions ainsi soulevées.L'ouvrage rassemble des horizons différents plus qu'il ne les dissocie et plaide nécessairement en faveur du métissage scientifique, de sorte qu'il alimente la réflexion mais aussi l'esprit d'ouverture. Au fil des pages, le lecteur pourra suivre l'évolution de ses curiosités, explorer ses interrogations et ainsi s'étonner de ce que la Vienne invite à suivre son cours, jusqu'à des horizons inconnus...
L'espace du cœur dans l'œuvre de Joseph Rouffanche
L'espace du cœur selon l'expression du poète Joseph Rouffanche représente " la mémoire des jeunes années, matériau de prédilection du poétique, substance dont presque tout poème plus ou moins se nourrit, que tout rappelle, où tout ramène, pour célébrer, magnifier, inventer, et pour un salut". La terre limousine incarne le "luxe du cœur" de Rouffanche (Élégies limousines). Il s'agit là à la fois d'un territoire fondateur, symbole d'un certain rapport au monde, réalisé dans l'enfance. Mais "l'espace du cœur" recouvre différentes acceptions que les études présentées ici explorent finement : lien du poète à l'espace aérien ; temple de l'écriture ; compagnonnage avec des auteurs de prédilection ; proximité d'un bestiaire ; cadastre du monde et cartographie de l'âme.
Théories et pratiques en géographie physique. Hommage au professeur Alain Godard/From Continent to Catchment. Theories and Practices in Physical Geography. A Tribute to Professor Alain Godard
70 collègues, français et allemands, australiens, britanniques, polonais, portugais, québécois, scandinaves ont contribué à la réalisation de l'ouvrage en hommage au professeur Alain Godard. Les contributions s'articulent autour de trois thèmes scientifiques représentatifs de l'itinéraire d'Alain Godard : les socles cristallins, les domaines froids, les bilans d'érosion et rythmes d'évolution.
"Il faut savoir cueillir les champignons et souvent ne pas les cueillir" disait Corinne Lepage. En effet, malgré les nombreuses mises en garde et conseils de prudence diffusés dans la presse, on relate encore chaque année des intoxications dont certaines sont mortelles. L'imprudence et une mauvaise connaissance sont à l'origine de la plupart des accidents... L'ouvrage est ainsi destiné à mieux informer un large public. Il présente la particularité de ne proposer qu'un nombre limité d'espèces (environ 200) et de ne concerner spécialement que les principaux champignons rencontrés dans la région du Limousin (Corrèze, Creuse, Haute-Vienne). Chaque espèce est présentée sous forme de fiche, comportant une description détaillée, un rappel de l'habitat, la toxicité éventuelle et les confusions possibles. Illustré de très nombreuses photographies couleur, il est facilement accessible à tous.
Le recueil est une promenade à travers les jardins sandiens de Nohant à l'Italie. Il s'efforce de recréer les formes du jardin marquées par la dialectique de la clôture et de l'ouverture et sollicitées par la double postulation de l'artifice et du naturel. Il explore aussi les fonctions du jardin qui se ramifient en fonction politique et sociale, narrative, poétique et métapoétique. Il fait enfin un sort aux langages floraux qu'ils viennent de la poésie, de la science ou de la philosophie du végétal. Les fleurs sandiennes fécondent la symbolique littéraire autant que la représentation plastique des aquarelles ou des dendrites.
Les contributions d'historiens, de sociologues, de spécialistes de l'image et de représentants de sensibilités religieuses et philosophiques diverses retracent l'histoire et le présent de la laïcité, de la Révolution au 21e siècle, en France et en Limousin. Elles abordent les problèmes que cette histoire a rencontrés, les résultats auxquels elle est parvenue. Dans une partie prospective, l'ouvrage s'intéresse au devenir de la laïcité face à l'islam, à la construction européenne et à la mondialisation.
La présence du parti communiste sur la scène politique française a été forte durant la plus grande partie du 20e siècle. C'est encore le cas aujourd'hui dans certaines campagnes, ainsi que dans la plupart des zones urbaines, malgré l'effondrement de l'Union soviétique. En s'éloignant des approches habituelles qui se sont focalisées sur l'étude des relations entre le communisme et la classe ouvrière, l'auteur propose une nouvelle interprétation afin d'expliquer les succès du parti communiste français et met en lumière les attitudes sociales et politiques qui se sont développées dans les campagnes durant une période critique, en pleine crise économique. À partir de longs entretiens avec 34 militants communistes encore en vie, et en s'appuyant sur l'analyse des résultats électoraux, l'ouvrage met l'accent sur le poids persistant du parti dans certains bastions ruraux du PCF, tels que le Limousin et la Dordogne, durant l'entre-deux-guerres. L'auteur montre comment le communisme a fait entrer dans des communautés rurales isolées des pratiques politiques modernes, comment il a redonné vie aux réseaux de sociabilité et de culture dans les villages, et comment il a réagi face à l'incapacité de l'État à faire face aux énormes changements que la lente disparition de la société paysanne engendrait. Enfin, l'auteur remet en question les interprétations habituelles qui attribuent les succès du parti dans les zones rurales à la tradition de gauche, au républicanisme rouge, ou aux structures familiales. En montrant comment les paysans français ont utilisé l'arène politique pour défendre leurs intérêts, le livre apporte un éclairage important sur la nature du communisme européen et sur la transformation des campagnes françaises durant le 20e siècle.
Comment peut-on se sentir Limousin ? Des réponses ont ici été fournies par quelque trente historiens dont des spécialistes d'histoire de l'art, du droit, de la géographie historique, des linguistiques, des spécialistes de la politique et du tourisme, et enfin des folkloristes. Ils ont étudié comment on est passé, à travers les vicissitudes de l'histoire et de la géographie politique, du pays des Lémovices à la région Limousin aujourd'hui. Avec leurs sources, leur culture et leur réflexion personnelles, les auteurs montrent comment ces deux anciennes notions de pays et d'identité ont été revisitées et sont plus que jamais d'actualité, comment elles se sont enrichies au fil du temps de nouveaux marqueurs. Depuis saint Martial, cher aux troubadours et aux chroniqueurs, jusqu'au développement original d'une tradition de gauche, d'un communisme rural ou la création d'une race bovine limousine. Une histoire des mentalités dans laquelle les drames contemporains donnent une nouvelle actualité aux drames anciens et en ravivent le souvenir dans la mémoire collective, le massacre d'Oradour renvoyant au sac de la cité de Limoges en 1370. Autant d'épisodes qui fortifient un amour du pays contrepoids de sa mauvaise image. Car l'opposition entre deux Limousins, "pauvre pays… bon et fertil" est une constante à la fois dans l'esprit des Limousins comme sous la plume et dans les jugements des gens d'ailleurs. C'est sur ce "Limousin noir, Limousin rose" que conclut Alain Corbin.