Au cours des années 80 et 90, le paysage scientifique où évolue la sémiotique a connu de grandes transformations: affaiblissement du structuralisme, développement des sciences cognitives, retour à la phénoménologie, demande croissante en matière d'analyse de la signification des pratiques sociales, artistiques et technologiques. La sémiotique ne cesse de découvrir de nouveaux domaines d'investigation: les interactions sociales, les objets du quotidien, les documents électroniques, notamment, sans renoncer pour autant aux langages littéraires et visuels à partir desquels elle s'est construite.Ce manuel s'efforce de faire le point sur l'état actuel des recherches sémiotiques, et d'en tirer les conséquences sur les grandes thématiques de la théorie de la signification: les structures élémentaires, les actants et la narrativité, les logiques et les dimensions du discours, et, pour finir, l'énonciation. Il dessine du même coup le cadre d'une synthèse entre les différents courants de recherche qui s'imposent actuellement.
Transformations d'objets, formes de l'espace, singularité phénoménales et pensée diagrammatique (topologie, physique, biologie, sémiotique)
Le propos de ce livre est de montrer que les nœuds, les singularités et les diagrammes sont des ingrédients essentiels d'une morphogenèse des phénomènes et d'une sémantique des formes. Les opérations (avec leurs règles) et les transformations (avec leurs lois) que l'on fait agir sur les nœuds, les singularités et les diagrammes sont à même d'engendrer ce qu'il convient d'appeler une pensée plastique des formes. De plus, ces mêmes opérations et transformations et les mouvements qu'elles engendrent ont la capacité d'investir notre propre champ d'actions, de perceptions et de représentations en produisant ainsi des effets de sens variés (morphologiques, phénoménologiques, symboliques). Cette étude se focalise sur les relations entre cette action plastique complexe des formes et les différents effets de sens qui en résultent. L'idée maîtresse de cet ouvrage est que la réalité, dans ses multiples formes, doit être saisie par l'intuition créatrice dans ses transformations dynamiques, et être comprise sous la perspective de ses possibles stratifications qui font sens. Les opérateurs d'une pensée plastique soient conçus comme des dispositifs d'une sémiodynamique de l'espace et du temps qui, dès lors, peut être envisagée comme l'étude des analogies et des homologies complexes entre les formes et leurs significations. Loin de se limiter à offrir une image du monde tel qu'il nous apparaît, les transformations à l'œuvre dans les phénomènes permettent d'accéder à de nouveaux modèles de la réalité, à une sorte de processus d'objectivation signifiante qui en restitue l'ensemble des changements de sa structure interne et les modes de constitution de sa forme globale.
La notion de métamorphose est fuyante, voire énigmatique. La transformation métamorphique met à mal l'identité et risque d'ébranler les fondements du faire sens. D'où l'intérêt pour le sémioticien des questions de la variabilité et de la permanence, du même dans l'autre et de l'autre dans le même. D'où également la fascination pour l'expérience discursive des limites et la possibilité d'une mise en question radicale.En même temps, on conçoit la difficulté à saisir la dynamique métamorphique. Quelles sont les conditions modales de la production et de la réception du métamorphique ? Dans quelle mesure la reconnaissance du changement métamorphique est-elle fonction de l'interaction entre le sujet sensible et l'objet, pourvu de propriétés morphologiques ? Quelles en sont les conséquences au niveau de la pensée, de l'affectif et du cognitif ? Enfin, est-il possible de dégager la syntaxe métamorphique, qui sous-tend des esthétiques différentes ? Telles sont quelques-unes des interrogations auxquelles notre projet tente d'apporter des réponses.Multipliant les lieux et les supports du métamorphique, cet ouvrage déploie une large gamme d'objets d'analyse, en passant des textes verbaux, littéraires et non littéraires, aux objets d'analyse non verbaux, aux ensembles multi-modaux et polysensoriels.
Bibliothécaire de Colbert, professeur de droit canon au Collège de France, philologue, historien, Étienne Baluze (Tulle, 1630 - Paris, 1718) est un pionnier de la méthode historique moderne. Ses travaux sur les pères latins de l'Eglise et sur les institutions de l'Europe médiévale, sans oublier l'histoire de sa province natale, lui conférèrent de son vivant une réputation européenne.Cette étude d'un grand savant de l'époque classique relève trois grands défis. il s'agit d'abord de restituer les méthodes novatrices mises en oeuvre par Baluze dans ses recherches et les résultats auxquels il est parvenu. il faut ensuite considérer la tension entre ses exigences de liberté intellectuelle et son absence d'autonomie sociale et financière. Sa carrière est ainsi une recherche permanente des protections, financières et politiques, qui lui assureront la sécurité, matérielle et intellectuelle. L'ayant trouvée au plus haut niveau, Baluze travaille alors pour ceux qui exercent le pouvoir, évêques, ministres ou princes et qui mobilisent pour cela un vaste ensemble de savoirs, à base juridique et historique. C'est ainsi pour répondre à leurs besoins que Baluze se lance dans de nouveaux travaux, sans pour autant abandonner sa quête critique de vérité. L'étude des liens entre exercice du pouvoir et production des savoirs est le troisième défi du présent ouvrage.Grâce à ce riche ensemble de contributions originales, Étienne Baluze le Tullois — Stephanus Baluzius tutelensis, comme il était connu de ses contemporains — retrouve la place qui lui revient dans l'histoire intellectuelle de l'Europe classique.
Qu'on la définisse comme la science des signes ou comme la discipline qui a le sens pour objet, la sémiotique souffre d'un discrédit : elle ne s'intéresserait qu'aux énoncés et à leur mode de fonctionnement interne. Il est vrai que, dès les origines, elle a suivi l'exemple de la linguistique et volontairement réduit son champ de juridiction ; elle a ainsi érigé une véritable muraille pour séparer les codes d'un côté, le monde et ses acteurs de l'autre. Mais il s'agissait là d'une séparation purement instrumentale, méthodologique et provisoire. Et qui ne saurait faire oublier ceci : que le sens vient du commerce avec le monde, et qu'il a un impact sur le monde. La sémiotique a mûri : elle a retrouvé le chemin du monde. Elle sait aujourd'hui voir que le sens émerge de l'expérience. Et qu'il oriente aussi l'action. Se réorientant vers le savoir et le faire, la sémiotique rencontre la rhétorique. Une discipline qui, depuis l'antiquité, étudie comment le sens se met en scène dans des discours sociaux Ou plutôt la sémiotique retrouve la rhétorique. Car, dès les années 60, Barthes avait pointé la modernité de cette discipline réputée poussiéreuse. Et dès cette époque certaines équipes de chercheurs, comme le Groupe µ, avaient introduit des préoccupations esthétiques, socio-communicationnelles et cognitives dans une théorie sémiotique qui, jusque là, était restée surtout formelle. Plus de trente ans après Rhétorique de l'image et Rhétorique générale, sans doute est-il temps d'examiner en quoi sémiotique et rhétorique ont partie nécessairement liée, et de célébrer à nouveau leurs noces.