Islam et société au sud du Sahara, n° 13/1999
Le volume poursuit l'étude de l'islam subsaharien, autour de cas choisis d'un bout à l'autre de l'aire concernée : Mauritanie, Bénin, Tchad, Soudan, Comores. Amadou Adama s'interroge sur l'avenir de l'enseignement privé islamique au Nord-Cameroun. A partir des rapports officiels et des interviews, l'auteur montre la grande médiocrité d'un enseignement dont le niveau d'encadrement et d'organisation reste constamment insuffisant et sous-qualifié. Rüdiger Seesemann prend l'exemple du Darfur (ouest du Soudan). L'auteur souligne l'importance de l'enseignement populaire du Coran autour de l'institution centrale qu'est la khalwa (ici, école), qu'il rattache historiquement à des influences occidentales (Borno, Wadaï). Il s'intéresse ensuite à la figure d'un des promoteurs contemporains d'une renaissance de l'enseignement coranique, 'Alî Bîtâ'î (né en 1930), et montre comment, au cours du 20e siècle, l'intégration du Darfur à l'espace soudanais donne la prévalence aux influences venues de l'Est et à de nouveaux modèles d'enseignement. Abdallah Chanfi Ahmed étudie la célébration du maulid (commémoration de la naissance du Prophète Muhammad) aux Comores, à travers l'analyse du principal ouvrage de référence, celui d'al-Barzandji, un auteur du 18e siècle, dont le texte est très répandu dans tous les pays de l'Océan indien. L'auteur montre comment, autour de ce texte, toute une liturgie sociale s'organise qui fait du maulid un temps fort de la sociabilité villageoise et urbaine. Denise Brégand procède à une étude comparative dans deux villes marchandes du Nord-Bénin : Parakou, cité de l'ancien royaume du Borgou, et Djougou. Elle cherche dans l'histoire de l'islamisation du Borgou et dans les conditions économiques propres à Parakou les raisons d'une résistance aux influences wahhabites, qui prospèrent au contraire à Djougou, cent kilomètres plus loin. Claude Arditi étudie l'émergence, à partir de la fin des années 1950, d'une classe de commerçants et de transporteurs musulmans au Tchad. Combinant alliances matrimoniales, relations avec les pouvoirs et liens de clientèle, cette classe impose son hégémonie à travers l'accès à un espace plus vaste qui intègre le Nigeria et le Nord-Cameroun. Le régime Hissène Habré porte un coup sévère à son autonomie et contraint nombre de ses représentants à l'exil. Grands commerçants et hommes d'affaires musulmans s'adaptent constamment aux nouvelles donnes du marché : développement du commerce avec les pays arabes du Golfe, secteur en pointe, aujourd'hui, et, bientôt, peut-être, économie pétrolière. David Robinson propose une biographie commentée de Shaikh Sidiyya Baba, leader confrérique et partenaire de la colonisation française en Mauritanie. Erigé en modèle par l'administration française, Shaikh Sidiyya apparaît comme le cofondateur de la Mauritanie coloniale.
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