Eschatologie catholique et sécularisation en France (XVIIIe XIXe siècle)
Depuis une vingtaine d'années, la question de " l'apocalypse " connaît un regain d'intérêt: qu'il s'agisse des catastrophes naturelles, du dérèglement climatique, des blockbusters hollywoodiens ou de la pandémie de Covid-19, la fin des temps semble désormais associée à des enjeux contemporains. Ce parallèle en ferait presque oublier l'influence que cette croyance dans l'Au-Delà a exercé, en France, sur les normes sociales, les mœurs et les mentalités. Toutefois, cet enseignement fut progressivement remis en cause par le processus de sécularisation apparu au XVIIIe siècle, au cœur du questionnement de cet ouvrage.
Cet ouvrage, rassemblant de nombreuses sources originales et inédites, montre comment l'enseignement catholique au Viêt Nam s'est adapté aux bouleversements du XXe siècle (colonisation, guerre, partition, réunification, ouverture). Il ne propose pas une " contre-histoire " mais, au contraire, une plus juste lecture de la place des catholiques dans l'histoire contemporaine du Viêt Nam, et de leur émancipation à l'égard des pouvoirs. Il permet ainsi de mieux comprendre le catholicisme vietnamien contemporain, l'une des Églises les plus dynamiques d'Asie.
Ce livre interroge le sens donné par les jésuites des pré-Lumières à l'idée de Beau. Dans la quête d'un " je ne sais quoi " mystérieux, frappant l'âme humaine comme un " feu céleste " pour l'élever au Beau absolu, les religieux veulent montrer l'alliance du Beau et du Vrai, point de rencontre avec la Vérité divine. Les " extraits " critiques des Mémoires de Trévoux, dont ils assurent la rédaction entre 1701 et 1762, analysent les publications européennes en Sciences, Lettres, Arts et Mœurs. À côté de la mise en valeur de l'harmonie de la nature par les physiciens et les naturalistes, les " Trévousiens " soulignent la beauté des mathématiques, tout particulièrement la " sublime et transcendante " géométrie. Parmi les productions artistiques et les " ouvrages de l'esprit ", la musique donne lieu à une intense querelle autour de la nature du son. Le potentiel didactique des vers latins est mis en avant, et l'" expression mesurée de la nature " fait de la poésie une philosophie authentique. Quant à la peinture, elle doit prioriser " la vérité ". Pour autant, le discours anthropologique trévousien ne se borne pas à un panorama " raisonné " d'une culture moderne qui s'émancipe des pesanteurs traditionnelles. Il correspond aux exigences ignatiennes d'une spiritualité active et féconde.
" Perdants " de l'Histoire, et, à ce titre, longtemps maltraités dans l'historiographie française, les dévots sont généralement ravalés à des clichés: catholiques fanatiques pendant les guerres de Religion, suppôts de l'Espagne sous le règne d'Henri IV, comploteurs invétérés sous celui de Louis XIII… Ils sortent enfin de l'ombre avec ce livre. Les treize interventions retenues couvrent la majeure partie de la période moderne, de la fin du xvie siècle au temps des Lumières. Elles reconstituent, tout d'abord, les affinités et les modes d'association des dévots, dans l'orbite de l'Oratoire, de Saint-Sulpice et de la Compagnie de Jésus. Elles approfondissent, ensuite, la question de leur engagement politique, à travers leur implication dans la querelle janséniste, de leurs activités dans les provinces françaises, de leur positionnement à l'égard de la monarchie absolue… Elles restituent, pour finir, leurs œuvres spirituelles et charitables, en s'attachant à refléter la diversité de ces dernières: dons de reliques, missions rurales, assistance aux pauvres, évangélisation de la Chine.
Qui se souvient aujourd'hui de la petite abbaye trappiste installée à Saint-Aubin-de-Médoc (Gironde) entre 1820 et 1830? Aussi mal connu que bien documenté, ce court épisode de l'histoire du diocèse de Bordeaux au XIXe siècle se situe pourtant au coeur des vicissitudes qui ont bousculé la renaissance de lavie cistercienne dans la France de la Restauration, ballottée entre l'observance de la Valsainte et celle de la réforme de Rancé. En 1826 et 1827, une suite de circonstances malencontreuses vient sceller l'éphémère et malheureux destin de ce monastère girondin.D'où vient la petite communauté qui s'installe à Saint-Aubin? Pourquoi le monastère est-il érigé en abbaye cinq ans à peine après sa fondation? Qui sait aujourd'hui que Chateaubriand a évoqué le frère Jean-Baptiste, son premier et unique père-abbé, dans le Génie du christianisme? Comment Alfred de Vigny connaissait-il également ce saint personnage? En répondant à ces interrogations, cet ouvrage s'attache à retracer et à mettre en lumière l'histoire de cette communauté de trappistes médoquine.
Cet ouvrage analyse l'environnement des radios confessionnelles et leurs stratégies de communication dans un contexte médiatique, religieux et social marqué par le libéralisme et de profondes mutations. Il nous fait découvrir l'extraordinaire expansion des médias radiophoniques en Afrique francophone et anglophone depuis le début des années 1990, son étude de terrain portant plus spécialement sur quatre pays d'Afrique de l'Ouest (Burkina Faso, Ghana, Togo, Bénin). Il nous apprend que tout en faisant une large part au message religieux, les radios mettent volontiers l'accent sur les problèmes de la vie quotidienne, le développement, la condition féminine, la démocratie et l'État de droit. Les questions concernant la santé, la maladie et sa guérison occupent souvent aussi une place de choix, spécialement dans les radios d'allégeance pentecôtiste ou relevant des Églises dites indépendantes. Sans oublier que le " divertissement " (chansons, contes, proverbes) a lui aussi son temps d'antenne. Les radios confessionnelles africaines mènent donc de front le prosélytisme et l'engagement social au nom de la logique d'une mission à double sens: ad intra et ad extra. L'usage préférentiel qu'elles font des langues locales dans un contexte où l'oralité n'a pas perdu ses droits facilite l'interaction active avec leurs publics et explique l'engouement qu'elles suscitent.
L'objet de ce livre est de rechercher la place des thématiques ésotériques dans la stratégie développée en France par les jésuites au tournant mouvementé du XVIIIe siècle. Dans le cadre de leur mission pastorale de défense de la tradition catholique, les pères jésuites s'appuient sur les productions littéraires de leurs écrivains professionnels et sur l'outil journalistique des Mémoires et du Dictionnaire universel de Trévoux pour concrétiser leur réponse face aux propositions philosophiques nouvelles. Ils s'attachent à investir les savoirs scientifique et historique. En même temps, ils abordent plusieurs questions fondées sur la notion de secret qui, à ce titre, se rattachent aux thématiques.Il s'agit pour eux de susciter un débat – souvent polémique – propice au déploiement d'un discours rhétorique plutôt que d'affronter directement les arguments adverses. Une stratégie ambiguë qui cache mal une incapacité à bâtir une doctrine cohérente et dont l'enjeu est double – apporter des réponses aux critiques protestantes qui menacent la tradition catholique et préserver les mystères cachés d'une nature créée par Dieu, au risque de soutenir des positions scientifiques obsolètes.
Cet ouvrage analyse les utopies religieuses qui fleurissent au Canada, portées par une vision du pays en tant que nouvel Éden ou refuge accommodant : l'Église catholique en Acadie, dans l'Ouest et dans les tribus indiennes ; les mennonites des grandes Plaines ; les colonies de mormons polygames rejetées par Salt Lake City ; le royaume bouddhiste tibétain de Shambala…Le prophétisme également est étudié dans sa permanence, visible dans le recours aux prédictions iroquoises par le mouvement écologiste, et dans l'éclosion de mystiques originaux au Québec, tels Frère André de Montréal (canonisé en 2010) , les visionnaires de cités idéales dans la mouvance de la célèbre Armée de Marie, ou encore ceux qui fuient les poursuites judiciaires à l'étranger.Les auteurs retracent la formation de ces véritables utopies concrétisées et en définissent les constantes : prophétisme autoritaire, millénarisme et apocalyptisme, agrairianisme communautaire, natalisme… Ils en voient l'explication dans l'immensité du territoire à développer et dans la démocratie canadienne, la plus tolérante au monde pour des groupes considérés comme déviants ailleurs. Ils montrent aussi les limites de ces expériences : l'utopie finit par être contestée de l'intérieur et de l'extérieur dès lors qu'elle tourne au colonialisme ou au despotisme. L'utopie religieuse, au sens de monde divin parfait, n'est souvent que dans l'œil du prophète qui croit la construire.
Dans les rapports tissés entre les religions et l'information depuis le XVIe siècle, deux mutations ont modifié la donne en profondeur. La première, culturelle et institutionnelle, réside dans le remplacement de la vérité religieuse par la liberté individuelle comme fondement de la société. Par étapes, un régime de laïcité a succédé à un régime de catholicité. La seconde mutation, technique, tient dans la multiplication et la diversification des moyens d'information. De l'imprimerie à l'Internet, plusieurs révolutions technologiques ont cumulé leurs effets pour ouvrir en grand l'éventail des ressources mobilisables, afin de penser sa religion ou celle des autres.Pour les confessions religieuses, cette double mutation se présente comme un risque mais aussi comme une chance. Le risque de ne pas rester maîtresses de ce qui se dit et s'écrit, la chance de toucher toujours plus d'hommes et de femmes. Les auteurs de ce livre ont exploré cette ambivalence dans quatre directions : la collecte de l'information religieuse ; les déformations et désinformations touchant les religions ; le secret dans les religions ; la régulation institutionnelle de l'information religieuse. Dans leurs travaux, ils ont privilégié l'espace français sans négliger les points d'observations plus lointains. Si, pour des raisons historiques évidentes, le catholicisme est la religion qui a le plus retenu leur attention, le protestantisme, le judaïsme et l'islam ont été également envisagés pour eux-mêmes ou en relation avec une autre religion. Et le champ de leurs investigations s'est en outre étendu à la franc-maçonnerie et aux sectes.
En étudiant le bouddhisme américain, cet ouvrage interroge les modalités d'adaptation qu'un système philosophique et culturel met en œuvre lorsqu'il s'installe dans une société radicalement différente de celles dans laquelle il s'est développé. Cette tradition orientale se divise aux États-Unis en deux branches majeures : celle des immigrants, apparue dès l'arrivée des d'ouvriers chinois et japonais au XIXe et qui s'est renforcée avec les flux migratoires après 1965 ; celle des adeptes de souche américaine.Après un essai de définition du bouddhisme, suivi d'un court compte-rendu historique de son expansion, l'auteur analyse les raisons possibles de l'adhésion des convertis, leur identité hybride, ainsi que leurs diverses voies de pénétration du terrain par la thérapie, l'art, l'éducation. L'auteur retrace en outre leur stratégie pour interagir avec la société environnante grâce à l'engagement social, l'affirmation du féminisme et l'implication politique. Les frictions entre les convertis et les immigrés sont également évoquées afin de prédire l'évolution du bouddhisme dans cette terre très accueillante. Un glossaire, des illustrations et des annexes complètent l'ouvrage.
Si la mondialisation est souvent débattue, on ne parle guère de son impact sur les religions. Ce livre démontre à quel point pourtant les deux phénomènes sont indissociables et se renforcent mutuellement. Les échanges commerciaux en réseaux planétaires et les flux migratoires multiples facilitent la diffusion des religions dans le monde et celles-ci accélèrent en retour les processus économiques et politiques de la mondialisation.Sont analysées ici les stratégies de conquête de réseaux intensément évangélisateurs (ceux du bouddhisme, de l'islam, du pentecôtisme), ainsi que les tensions suscitées par leur implantation et leurs méthodes, et l'habileté de groupes ésotériques (Rose-Croix, théosophes, suiveurs de Guénon) à se couler dans la mondialisation. A contrario, on observera les résistances à cette frénésie de communautés cultivant un fort nationalisme (néo-païens, shintoistes).Sur cet échiquier, une grande place est accordée à la France. Plusieurs communautés immigrées tissent des rapports avec leurs voisins en perpétuant la religion de leurs ancêtres: Russes orthodoxes en Savoie, Chaldéens et Sikhs en banlieue parisienne. Nombreux sont ceux qui, tels les Africains chrétiens, tentent de se repérer dans une société qui aurait perdu le christianisme qu'elle leur a enseigné. Tous ces apports transforment le pays en un intense laboratoire de recompositions religieuses et identitaires et stimulent l'économie du spirituel, et l'économie en général, à l'instar de ce qui se passe dans le reste du monde.
Contrairement à ce que l'on croit trop souvent, les États-Unis ne sont pas à l'origine de tous les nouveaux mouvements religieux contemporains. À partir de l'exemple du néo-paganisme, c'est ce que démontre cet ouvrage, le premier issu de la recherche française dans ce domaine. En effet, même s'il s'est transformé au contact de la société américaine, le mouvement néopaïen est d'abord venu d'Europe. Ses sorciers proposent des changements radicaux de paradigmes totalement contraires aux préceptes chrétiens conservateurs. ils ont décidé de puiser à toutes les sources qui leur convenaient, poussant ainsi à l'extrême l'exercice du " spirituel à la carte " en vigueur aux États-Unis et en Occident en général.On verra comment ils peuvent se réclamer du polythéisme et du paganisme grâce à un terrain préparé à la fois par le pluralisme, le recul du dogmatisme, le relativisme et l'éclectisme caractéristiques du New age, ainsi que par le substrat culturel spécifique à la pensée postmoderne. Seront analysés leurs pratiques rituelles communautaires et leur engagement idéologique qui leur vaut souvent l'hostilité des milieux les plus conservateurs de leur environnement judéo-chrétien.