Cette anthologie bilingue rend compte de la floraison exceptionnelle du théâtre irlandais depuis les dernières années du XIXe siècle jusqu'aux productions actuelles de McGuinness ou de Barry, grâce à un choix d'extraits des meilleures pièces que précèdent des introductions rédigées par des spécialistes de chacun des auteurs. C'est un foisonnement de courants, d'idées et de formes que cet ouvrage nous invite à découvrir.Extraits de : The Importance of Being Earnest ; Pygmalion ; Spreading the News ; Cathleen Ni Houlihan ; The Playboy of the Western World ; Red Roses for Me ; Exiles ; The Moon in the Yellow River ; All that Fall ; The Hostage ; Lovers (Winners) ; Tea, Sex and Shakespeare ; The Gigli Concert ; Pentecost ; Boss Grady's Boys ; Observe the Sons of Ulster Marching Towards the Somme.
Michael McLaverty (1904-1992), né dans le comté de Monaghan, a passé une partie de sa jeunesse dans l'île de Rathlin ; ensuite il s'installa à Belfast comme enseignant et mourut dans le comté de Down. Cette topographie coïncide avec celle de ses nouvelles : il y évoque des paysages de l'Ulster et les petites gens qui s'y livrent à la pêche, aux travaux des champs ou aux diverses tâches domestiques. À ce réalisme se mêle une sorte de rêverie poétique, pleine d'amour, quelquefois cocasse ou bien teintée d'humour, au caractère souvent doux-amer. Il privilégie la vision du cœur et fait appel à notre affectivité ainsi qu'à notre intuition. Dans sa préface, Seamus Heaney, jeune professeur dans l'école que dirigeait McLaverty, célèbre " la pureté de son art, la justesse de sa vision ".
Le célèbre pamphlet du physicien et philosophe William Molyneux, né et mort à Dublin (1656-1698), The Case of Ireland being bound by acts of Parliament to England Stated (1698) ou Discours sur la sujétion de l'Irlande aux lois du Parlement d'Angleterre, est, par sa vision du contexte historique, un apport précieux à la connaissance de l'époque et des relations entre l'Irlande et l'Angleterre.En évoquant les affaires qui portent atteinte à l'autonomie de l'Irlande, l'auteur conteste au Parlement d'Angleterre le droit de légiférer pour l'Irlande au motif que l'Irlande est un royaume séparé, qu'elle a son propre Parlement et n'est pas représentée au Parlement d'Angleterre. La théorie selon laquelle l'Irlande était sujette du roi d'Angleterre et non du Parlement n'était pas facile à concilier avec la situation nouvelle créée par la Révolution de 1688-1689 qui établissait le Parlement, et non le roi, comme l'autorité suprême en Angleterre. Cet ouvrage fit sensation et fut considéré comme la première revendication de l'indépendance irlandaise.
Après ses compatriotes W. B. Yeats (1923), G. B. Shaw (1925) et S. Beckett (1969), Seamus Heaney vient de recevoir le prix Nobel de littérature " pour une œuvre caractérisée par sa beauté lyrique et sa profondeur éthique, qui fait ressortir les miracles du quotidien et le passé vivant ".Il se penche ici sur le processus de sa propre création poétique dans un texte particulièrement révélateur, car son œuvre n'est pas seulement poésie, mais aussi " pensée sur la poésie et tentative pour définir le personnage du poète, dans un vaste mouvement où tout est étroitement lié, où créer est inséparable de la réflexion sur l'acte créateur ".On trouvera ensuite des articles de spécialistes de la littérature irlandaise et d'amoureux de la poésie qui tous s'appliquent à décrire la " transition du monde des données aux mots de l'invention " et proposent un périple dans les confins de l'imagination de Seamus Heaney qui exprime son attachement à la terre d'Irlande dans la gestion, par exemple, du mythe nouveau de la tourbière, mais donne en même temps à sa poésie une perspective internationale. L'artiste qui reste le plus fidèle aux traditions locales est aussi le plus universel.
Le processus de la création est ici étudié en poésie, au théâtre et dans le roman, chez quelques-uns des auteurs les plus éminents de la littérature irlandaise contemporaine : Seamus Heaney et John Montague, Tom Kilroy et Tom Murphy, John McGahern et John Banville. Chaque écrivain essaie de déterminer ce qui se passe en lui lors de la gestation de son œuvre. En face, un critique expose son point de vue sur le même phénomène. L'écrivain se livre à une introspection courageuse ; le critique à une exploration minutieuse nourrie par l'examen des écrits. La convergence de ces regards intérieurs et extérieurs et leur complémentarité éclairent le mystère de la création.
La prééminence irlandaise dans le domaine de la nouvelle a souvent été remarquée par les commentateurs. De George Moore, Edith Somerville et Martin Ross jusqu'à nos jours, le genre a fleuri et rallié les écrivains aussi bien catholiques que protestants, ceux du Nord comme ceux du Sud. James Joyce, Sean O'Faolain, Edna O'Brien, Brian Friel et William Trevor ainsi que beaucoup d'autres qui méritent d'être connus témoignent de cette réussite. " L'importance du seanachie, explique David Marcus, conteur traditionnel, personnage central dans la vie irlandaise rurale jusqu'au XIXe siècle, doit expliquer la prédisposition de l'auteur irlandais du XXe siècle à choisir la nouvelle ".Ce succès, on le doit à la vigueur et à la souplesse de l'anglo-irlandais et à une perspective spécifiquement irlandaise. Ces nouvelles sont une critique des conditions de vie en Irlande, des portraits satiriques ou amusés, des regards qui plongent dans les âmes et dans les cœurs, une recherche de la vérité et de la joie. Elles ont la même intensité et la même densité que les nouvelles des maîtres russes dont elles s'inspirent parfois. Tchekhov marqua ainsi son empreinte sur Michael McLaverty et sur beaucoup d'autres. Certains de ces écrivains sont de véritables poètes en prose.
Cet ouvrage nous offre un large panorama de la production théâtrale dans l'Irlande contemporaine à travers des études qui portent notamment sur les pièces de théâtres de Brian Friel, de Stewart Parker, de Tom Murphy, de Thomas Kilroy, de Frank McGuinness et de Seamus Heaney.
Les efforts de Yeats pour définir une culture nationale se concentrèrent sur le théâtre. Il passe ainsi du " Crépuscule celtique " à la lumière froide du monde réel, évolution sensible aussi bien dans la prose que dans la poésie. Il s'interroge sur les fins du mouvement dramatique qu'il a initié, puis traite de problèmes d'actualité : administration du théâtre, détails de production. Son exaspération, voire son amertume, transparaît lorsqu'il dénonce les attaques dont Synge est la cible à propos par exemple de L'Ombre de la ravine ou du Baladin. Tous ces articles sur le théâtre littéraire irlandais, la plupart écrits entre 1899 et 1917, sont rédigés dans une prose plus simple et plus directe que ses articles antérieurs. Là encore on perçoit la même évolution que dans l'écriture poétique.Le dessin humoristique d'Edmund Dulac qui figure en couverture représente Yeats, marionnette énorme, dont les ficelles sont manipulées par des personnages, ce qui symbolise sans doute la situation de l'homme de théâtre à cette époque, tiré, dans une direction, par ses problèmes à l'Abbaye où les pièces populaires occupaient le temps et les efforts de la compagnie et, dans l'autre, par sa découverte d'une nouvelle forme de théâtre réservée à une élite.