Compostelle, La Mecque, Lourdes, Jérusalem, les pèlerinages connaissent un regain inattendu en ce début de XXIe siècle. Les raisons de ce succès ne manquent pas : volonté de rompre avec un quotidien pesant, essor des voyages, souci de retrouver des traditions, recherche d'une symbiose avec la nature, fonction identitaire de la religion, etc... Le pèlerinage a beau être vécu souvent comme un acte individuel, il s'agit incontestablement d'un phénomène de société. C'est pourquoi, jadis comme aujourd'hui, les pouvoirs publics ont très souvent mis en oeuvre une " politique du pèlerinage ". Il s'agit non seulement d'assurer l'ordre public, mais également de capter au profit des autorités civiles les foules pèlerines, voire les détourner de leur objectif spirituel initial. Plus récemment, les partis et mouvements politiques de masse instituèrent des pèlerinages non religieux, à la fois actes identitaires et manifestations de force. Dans la continuité de travaux portant sur les couleurs, les emblèmes et les symboles de la politique, des historiens se sont retrouvés à l'occasion d'un colloque international et pluridisciplinaire pour explorer les différentes modalités de la politisation des pèlerinages. Prenant pour objet des lieux et des moments variés, ils en ont décrypté le sens politique, implicite ou explicite. Ces études du langage non verbal de la politique mettent en évidence l'importance des gestes et des attitudes, des objets et des monuments. L'ascèse du chemin, le dépassement de soi, les rites de participation, l'héroïsme du but tant convoité et enfin atteint, tout ne conduit-il pas à faire du pèlerinage une métaphore du combat politique?