La garde de fer argentine consista en un vaste ensemble de réseaux et d'acteurs du militantisme péroniste apparu au début des années 1960. Une décennie plus tard, ce groupe militant avait acquis une dimension nationale, après l'Unité décidée avec le Front national des étudiants (FNE). Dès lors se constitua, sous le nom d'Organisation unique du Transfert générationnel (OUTG), un espace politique unifié, hautement hiérarchisé et discipliné dont les objectifs de base furent la formation de cadres politiques et la création d'engrenages politico-territoriaux au service du mouvement péroniste conduit par Juan Perón. De cette trajectoire organisationnelle apparurent des cadres politiques dirigeants qui, à partir des années 1980, commencèrent à dominer certains espaces et structures institutionnelles, en occupant diverses fonctions au sein des partis politiques, de la gestion de l'État, dans les groupes parlementaires et listes électorales, et dans diverses instances associatives et institutionnelles (universités, organismes scientifiques, organisations patronales, etc.). Mais, en souvenir de la vieille Garde de Fer, et en tant que produit de tentatives avortées d'institutionnalisation partisane, apparut également une trajectoire organisationnelle de conversion au catholicisme, animée dans une large mesure par des acteurs qui avaient été les protagonistes du militantisme révolutionnaire des années 1960-1970. L'analyse de ces trajectoires militantes, pratiquement oubliées jusqu'à aujourd'hui dans les études universitaires, permet de reconstruire deux phénomènes plus vastes: celui de l'adhésion au péronisme et celui de la création d'organisations militantes dans le contexte de la mobilisation sociale apparue après la destitution de Perón (1955), mobilisation accentuée par la Révolution cubaine (1959), les transformations socio-religieuses internationales et le climat d'autoritarisme que connut le pays pendant toutes ces années. Éloigné aussi bien de la lecture aberrante que de la lecture héroïque, Servir Perón. Trajectoires de la Garde de Fer se propose d'expliquer comment, à partir des nébuleuses militantes des années 1960 et du début des années 1970, des parcours générationnels sont apparus et ont tenté de marquer la vie politique argentine.