Parole et geste dans la tragédie grecque
À la lumière des trois " Électre "
On est à Athènes, vers 414 avant J.-C. Dans le théâtre de Dionysos sous l'Acropole.Gradins, sol de terre battue, décor rudimentaire: une grande porte dansun bâtiment de bois. Au programme, Électre de Sophocle.La porte s'ouvre, Électre apparaît. La fille de Clytemnestre et d'Agamemnon.Clytemnestre a assassiné Agamemnon à son retour de Troie, après dix ans deguerre. Elle règne aux côtés de son amant, Égisthe. Électre vient hurler sa peinedevant le palais de Mycènes, face aux 12 000 spectateurs athéniens. Elle prendà témoin le jour qui se lève, rappelle le meurtre affreux de son père, invoqueles déesses de la vengeance. Sophocle la représente ainsi, accablée par le deuil.Grâce à une tradition longue de 2 400 ans, nous connaissons les mots d'Électreprononcés ce jour-là, ceux de l'héroïne, ceux du poète, ceux de l'acteur derrièrele masque. Nous avons le texte, qui permet d'imaginer les gestes, les effetsde scène, l'émotion des spectateurs, le spectacle vivant.Car les mots recèlent toujours des gestes. " On ne peut pas parler sansbouger! " s'exclame Socrate, " la danse vient de là ". Entre les lignes, on devinedes gestes de différentes natures: jeu et danse du comédien; actes de paroled'Électre qui prie, se lamente, jure, maudit; figures stylistiques par lesquellesle poète donne corps au texte… Le grec serait une langue morte? Par Zeus!Tout juste assoupie, ne demandant qu'à se remettre en mouvement – et àfaire danser sous nos yeux ces héroïnes et ces héros d'un autre temps.
29.90€