Les textes qui composent ce dossier ont pour origine une journée d'étude organisée à l'EHESS, intitulée A-t-on enterré l'espace public ?. Elle ouvrait la réflexion sur ces mouvements en partie paradoxaux d'exportation, de relégation ou de reprise du concept d'espace public. Depuis, des événements socio-politiques majeurs – la crise financière, les " printemps arabes ", la crise malienne, notamment, ainsi que des évolutions moins brutales mais tout aussi décisives comme l'invasion massive de nos existences par le numérique – n'ont fait que confirmer la fécondité heuristique de cette enquête qui s'est poursuivie, diversifiée et infléchie. C'est donc à une analyse de l'espace public à plusieurs voix et à plusieurs disciplines que ce dossier invite, mobilisant aussi bien le regard de philosophes du politique, de sociologues, d'historiens, d'anthropologues ou de politologues; pour certains, spectateurs attentifs de la scène politique européenne, pour d'autres, fidèles observateurs des espaces politiques contemporains d'Afrique de l'Ouest, d'Argentine ou d'Iran, enfin pour quelques autres fins connaisseurs de la Grèce antique ou de la période révolutionnaire soviétique.
La manifestation est issue du réseau de recherche "Journées franco-suédoises de linguistique", créé en 2005 à l'initiative du professeur Bernard Laks, fondateur et à l'époque directeur du laboratoire linguistique MoDyCo (UMR 7114 CNRS) de l'Université de Paris X Nanterre, et de Maria Kihlstedt et Marianne Desmets, maîtres de conférences à cette même université. Les " journées " ont elles pour objectif de renforcer les liens entre la France et la Suède dans le domaine de la recherche linguistique et de mettre en place des échanges franco-suédois dans le cadre de la formation doctorale en linguistique.
Le volume est centré sur les défis que l'économie de l'immatériel lance à nos sociétés. Le capital des sociétés développées mobilise les technologies plus que les produits, le marketing plus que l'industrie et une économie des symboles plus que des économies d'échelle. Comprendre cette configuration, c'est revenir sur des distinctions parfois peu visibles dont traitent les différentes contributions du volume. Ainsi des réflexions fondamentales proposées par Philippe Dujardin concernant l'assemblage humain et, ses opérateurs constitutifs de notre historicité. Son essai " De quoi sommes-nous contemporains ? " ouvre un numéro riche de nombreuses études sectorielles de la modernité.Les consommateurs japonais sont ainsi passés en trente ans de l'enthousiasme pour les produits industriels de qualité au désenchantement du monde (Kyoko Naiki), et le marketing événementiel s'épuise à susciter de nouveaux désirs (Hillel Schlegel). Comment ne pas y voir un des motifs de l'abstention électorale en Europe (Gilles Rouet) ? L'utilitarisme comme philosophie spontanée du capitalisme industriel s'épuise en spécialisation à outrance, qui renforce la déconnexion entre des univers de pratiques étanches les unes aux autres. On ne saurait sur ce point être plus clair que Michel Vinaver, dont l'oeuvre magistrale Par dessus-bord se situe à ce moment de basculement des entreprises familiales vers un marketing généralisé (entretien avec Gérald Garutti). Cette transformation est l'origine du diagnostic posé par André Gorz (Carlo Vercellone) : si, pour le capitalisme cognitif, le contrôle social est aussi central que le profit, l'économie de la connaissance perturbe le modèle dominant et offre de nouveaux terrains pour agir. D'où la nécessité pour la pensée critique d'observer la complexité et la coopération jusque dans une approche de l'évaluation des travaux scientifiques (Aurélie Torregrosa). Pour les sciences sociales, cette évolution passe par une dimension multiculturelle et collaborative (Gérard Wormser), à l'image de la créolisation qu'Edouard Glissant oppose à la mondialisation (Edelyn Dorismond). De fait, c'est en réagissant aux excès du rabattement des actions humaines sur un plan de conformité bureaucratique que s'exprime la liberté, tant pour les artistes et auteurs contemporains (Joëlle Zask) que pour les intellectuels de gauche hier (Anne Mathieu) et les Dreyfusards avant-hier - à commencer par Alfred Dreyfus lui-même dans ses cahiers de captivité (Pierrette Turlais). Le rapport spécifique de la temporalité aux institutions forme donc la matière principale de ce volume.
Quand on dit " minorités " certains sortent, immédiatement, leur revolver : quotas et statistiques ethniques. " Quoi ? disent-ils, cela a-t-il un sens, intellectuellement parlant, de compter ? "
Avec l'élection de Barack Obama à la présidence, l'Amérique est entrée dans un nouveau temps politique de son histoire. Les démocrates ont repris la Maison Blanche et étendu leur majorité au Congrès. Par le biais d'Internet et grâce à une démographie qui ne peut que les favoriser, ils disposent d'atouts majeurs pour oeuvrer en faveur du progrès pour lequel ils se battent. Cette gauche nouvelle se fonde sur la responsabilité individuelle - l'État ne peut pas tout faire et le marché est bien la principale source de création des richesses - mais aussi et surtout sur la responsabilité mutuelle : l'État reste là pour armer les individus prêts à relever les enjeux du 21e siècle. L'Amérique quitte l'ère de Ronald Reagan et des économistes de l'école de Chicago, celle d'une droite avant tout pro-business, réactionnaire, individualiste et armée de militants religieux pour faire avancer sa cause. Irak, Afghanistan et crise économique, ces priorités de l'administration de Barack Obama sont analysées ici.Mêlant les analyses de grands spécialistes des États-Unis comme John Judis, André Schiffrin ou Saskia Sassen aux contributions de bloggers-journalistes comme Marjorie Paillon (Ilovepolitics) ou Jean-François Schwab (America Polyphony), et reprenant les revues de livres publiées par Niels Panel pour Sens Public lors de la campagne, le volume constitue un outil made in USA très précieux pour comprendre l'Amérique d'aujourd'hui, et à venir.
L'Internet, entre savoirs, espaces publics et monopoles
L'Internet n'est pas seulement un espace communicationnel favorisant l'échange d'information, de biens culturels ou de consommation, il contribue également au redéploiement des forces sociales, économiques, ou politiques. Il semble ainsi constituer un continuum pratique allant de l'expression privée des opinions à la revendication de l'action publique, que les verrous classiques de la coutume et du droit ne suffisent plus à baliser. Bien plus, la puissance appropriative des outils informatiques fait coïncider, mais sur un mode conflictuel, la tradition du partage des savoirs et celle de la sécurité des biens ou de leur propriété. De fait, la disponibilité immédiate des oeuvres scientifiques ou artistiques et les bouleversements liés à leur mode de production pourraient profondément remodeler les processus de création, de diffusion, et d'appropriation des connaissances.Les contributions rassemblées ici cherchent à approfondir les questions qui se posent à la jointure des contraintes objectives pesant sur les réseaux (technostructure, systèmes juridiques multiples, etc.) et des processus d'autonomisation culturelle et politique qu'ils semblent favoriser.
" Être ou s'historialiser ? " Rappelée par Sartre dans les Cahiers pour une morale (1947-1948), cette alternative n'en était plus une pour les intellectuels européens après 1938. Ils durent traduire leur projet littéraire en motifs d'action. Sartre le fit en intégrant ses premiers travaux sur l'imaginaire à une phénoménologie de l'histoire.Les auteurs retracent ici l'essentiel des recherches sartriennes entre les accords de Munich (1938) et la révolte de Budapest (1956). Ils sont chercheurs et enseignent dans le secondaire, en classes préparatoires, ou dans le supérieur, au sein de diverses Universités en France (Sorbonne Paris I et Paris IV, Sciences-Po), aux Etats-Unis (Harvard), en passant par l'Italie, la Belgique, la Grande-Bretagne (Oxford) et le Brésil.
"Être ou s'historialiser ?" Rappelée par Sartre dans les Cahiers pour une morale (1947-1948), cette alternative n'en était plus une pour les intellectuels européens après 1938. Ils durent traduire leur projet littéraire en motifs d'action. Sartre le fit en intégrant ses premiers travaux sur l'imaginaire à une phénoménologie de l'histoire.Les auteurs de volume retracent l'essentiel des recherches sartriennes entre les accords de Munich (1938) et la révolte de Budapest (1956). Ils sont chercheurs et enseignent dans le secondaire, en classes préparatoires, ou dans le supérieur, au sein de diverses Universités en France (Sorbonne Paris I et Paris IV, Sciences-Po), aux Etats-Unis (Harvard), en passant par l'Italie, la Belgique, la Grande-Bretagne (Oxford) et le Brésil.