Pierre Sudreau appartient à la génération des grands experts-commis modernisateurs des Trente Glorieuses. Son parcours se distingue par des expériences professionnelles très diverses : haut fonctionnaire, ministre, élu, président de nombreux groupements d'intérêt, comités et associations. Il incarne la fraction des élites placée à la frontière entre société civile et société politique, dont le rôle de passerelle active entre plusieurs milieux mérite attention. L'itinéraire de Pierre Sudreau est encore plus remarquable par ses ruptures. L'étudiant engagé dans la Résistance manque d'abord de mourir en déportation. Il entame ensuite une trajectoire ascensionnelle spectaculaire – plus jeune préfet de France, ministre de la Construction puis de l'Éducation nationale du génér ...
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Pierre Sudreau appartient à la génération des grands experts-commis modernisateurs des Trente Glorieuses. Son parcours se distingue par des expériences professionnelles très diverses : haut fonctionnaire, ministre, élu, président de nombreux groupements d'intérêt, comités et associations. Il incarne la fraction des élites placée à la frontière entre société civile et société politique, dont le rôle de passerelle active entre plusieurs milieux mérite attention. L'itinéraire de Pierre Sudreau est encore plus remarquable par ses ruptures. L'étudiant engagé dans la Résistance manque d'abord de mourir en déportation. Il entame ensuite une trajectoire ascensionnelle spectaculaire – plus jeune préfet de France, ministre de la Construction puis de l'Éducation nationale du général de Gaulle – avant de démissionner en 1962 par refus du référendum constitutionnel. Il renonce à une carrière politique nationale, se consacrant à des fonctions électives locales, comme député-maire de Blois, et à de multiples postes de défense, de direction ou de représentation des activités productives privées, tout en professant un européisme convaincu. Cette reconversion lui vaudra de présider le comité qui a rédigé le Rapport sur la réforme de l'entreprise de 1975. En étudiant ce parcours singulier, une douzaine de chercheurs éclairent de nombreux aspects de la vie politique et économique au temps de la Grande Croissance. Leurs travaux font aussi ressortir la différence entre l'innovation transpartisane qu'a représentée la Résistance, en période exceptionnelle, et, à l'inverse, les difficultés de l'approche a-partisane et du centrisme politique à s'affirmer comme force nationale en temps ordinaire.