En 1930, Karl Mannheim, fraîchement nommé à la prestigieuse chaire de sociologie de l'université de Francfort-sur-le-Main, consacre son premier cours à la " sociologie générale ". Cet enseignement est un jalon méconnu dans l'histoire de la sociologie. Sa transcription, tardivement découverte, est pour la première fois traduite et présentée en français. Au cœur d'une Europe meurtrie et lorsque l'Allemagne s'enfonce dans la crise qui mènera à l'effondrement de la république de Weimar, Mannheim expose dans son cours une conception de la sociologie qu'il considère comme l'expression même de la conscience moderne. Cette conception prend une valeur éminemment politique. Si l'on admet que le fascisme constitue une " reprimitivisation " de la pensée, comme il l'affirme, l'attit ...
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Préface. La vocation politique du métier de sociologue, par Dominique Linhardt
Sociologie générale. Transcription du cours du semestre d'été 1930
Première leçon. L'objet, la méthode et l'attitude de la sociologie Deuxième leçon. " Vie expérimentale " et distanciation de la vie Troisième leçon. La distanciation de la vie et ses raisons : la différenciation sociale et le " type humain sociologique " Quatrième leçon. Trois phases historiques dans les réactions intellectuelles à la crise de la vie : utopisme, romantisme, existentialisme Cinquième leçon. Le phénomène de la reprimitivisation résultant de la distanciation de la vie : simple échappatoire ou vraie solution ? Sixième leçon. Les formes de la reprimitivisation (I) : la " régression " de l'intellect dans le fascisme Septième leçon. Les formes de la reprimitivisation (II) : le " figeage " de la pensée dans le marxisme orthodoxe Huitième leçon. L'idéal de la pensée mouvante et le type de la pensée orthodoxe Neuvième leçon. Pensée figée et pensée mouvante, orthodoxie et intelligence Dixième leçon. Le rôle des intellectuels dans la situation présente : l'attitude, le sujet et la méthode de la sociologie (une reprise)
En 1930, Karl Mannheim, fraîchement nommé à la prestigieuse chaire de sociologie de l'université de Francfort-sur-le-Main, consacre son premier cours à la " sociologie générale ". Cet enseignement est un jalon méconnu dans l'histoire de la sociologie. Sa transcription, tardivement découverte, est pour la première fois traduite et présentée en français. Au cœur d'une Europe meurtrie et lorsque l'Allemagne s'enfonce dans la crise qui mènera à l'effondrement de la république de Weimar, Mannheim expose dans son cours une conception de la sociologie qu'il considère comme l'expression même de la conscience moderne. Cette conception prend une valeur éminemment politique. Si l'on admet que le fascisme constitue une " reprimitivisation " de la pensée, comme il l'affirme, l'attitude sociologique se pose comme un rempart civique et une opposition. Elle aguise la conscience collective dans une société en passe de modernisation, face à des forces qui ne peuvent espérer l'emporter qu'en parvenant à étouffer cette réflexivité.À l'heure où l'influence des partis populistes et nationalistes d'extrême droite ne cesse de croître en Europe, ce texte délivre un regard engagé sur la finalité politique des sciences sociales. La présentation par Dominique Linhardt, tout en situant le cours dans son contexte historique, vise à appuyer cette portée de l'enseignement de Mannheim pour surmonter la crise actuelle des sciences sociales.