L'exposition Magiciens de la terre à Paris en 1989 est considérée comme emblématique, à l'échelle internationale, de la présence de la postcolonialité dans le champ de l'art contemporain. Alors que les débats qu'elle a suscités ont conduit, à travers le monde, à de nombreuses propositions critiques initiées par les théories postcoloniales et décoloniales, ils ont été délaissés en France. Ce décalage avec les travaux internationaux initiés par les luttes anti-colonialistes et postcolonialistes, marquées par les analyses de Frantz Fanon et Aimé Césaire, est saisissant et s'impose jusqu'à la décennie 2000. Les contributions transdisciplinaires de cet ouvrage s'efforcent de repérer les facteurs qui, dans le champ de l'art contemporain en France, ont freiné ou minorent les apports des théories postcoloniales et décoloniales, les outils qu'elles proposent et leurs critiques. En prêtant, pour la majorité d'entre elles, une attention particulière à la période comprise entre 1989 et 2014, à partir de l'analyse d'œuvres, de revues et d'expositions, elles examinent l'oubli très sélectif que la France a de son passé, observent les relations existantes entre le récit historiographique, le concept d'universalisme, le modernisme français et l'art contemporain, puis soulignent des initiatives qui rompent avec ces paradigmes et engagent une réécriture de l'histoire de l'art.