Comment fonctionnent les politiques culturelles en Suisse, et qui prend les décisions ? Qui est considéré comme un participant légitime, et par quels processus ces arrangements changent-ils, en (dé) faveur de qui ? Cet ouvrage s'intéresse aux acteurs politiques, administratifs et culturels qui " font " les politiques culturelles. Adoptant une approche configurationnelle originale puisant dans la science politique, la sociologie des élites et les cultural policy studies, ce livre se focalise sur le pouvoir et les mobilisations des acteurs pour analyser de manière comparative les transformations des politiques culturelles dans les cantons de Berne, Genève et Bâle.Dans une approche combinant analyse chronologique des processus et analyse des réseaux, les évolutions différenciées de ces politiques publiques de la culture sont expliquées par la mobilisation, ou l'absence de mobilisation, de plusieurs coalitions et acteurs au sein des configurations. Certain·e·s participant·e·s peuvent en effet faire avancer les processus de décision en s'appuyant sur leurs positions institutionnelles, leurs interconnexions professionnelles et personnelles : des entrepreneur·e·s de politique publique qui s'activent pour favoriser un changement et des médiateur·e·s de politique publique qui agissent en faveur d'un compromis.Ce livre met ainsi en lumière l'articulation délicate de différents principes – entre fédéralisme et subsidiarité, entre démocratie et autonomie de l'art – qui structure les débats et les décisions concernant les politiques culturelles en Suisse.
Trajectoires de personnes sans assurance-maladie en Suisse
Malgré un système obligatoire d'assurance-maladie, on estime que des dizaines de milliers de personnes se retrouvent durablement sans couverture santé en Suisse, rendant leur recours et leur accès aux soins complexes. Au travers d'entretiens et d'observations dans des lieux sociaux et des structures de santé à Genève, cet ouvrage analyse les parcours de vie et de soins de personnes non assurées, en questionnant les logiques d'intégration et d'exclusion présentes dans le système de santé suisse. Cette recherche met en lumière que l'accès aux soins s'organise selon des critères et normes, révélant des pratiques de tri en fonction des trajectoires des individus. Elle éclaire également sur le rôle des réseaux personnels dans le recours aux soins, et dévoile un phénomène d'externalisation des soins au-delà de la frontière.
Véritable plongée dans les méandres du système de l'asile, cette étude propose de suivre les trajectoires des réfugiés à partir de leur arrivée en Suisse. S'appuyant sur une remarquable compilation de données issues de la statistique publique, l'auteure met en évidence les désavantages chroniques auxquels sont confrontés les réfugiés sur le marché du travail, tant durant la procédure d'asile qu'après l'obtention d'un permis de séjour stable. Les droits attachés à chaque permis façonnent ainsi la vie des individus, affectant profondément et durablement leurs chances d'intégration professionnelle. Entre incitation à entrer sur le marché du travail et limitation d'accès aux permis les plus stables, les réfugiés sont donc placés face à un réel paradoxe.Cet ouvrage offre de précieuses clefs pour comprendre les politiques d'asile et d'intégration helvétiques, éclairant la diversité des parcours des réfugiés, les droits associés à chaque type de permis, mais aussi l'impact des évolutions législatives sur les possibilités d'insertion des personnes venues chercher asile en Suisse.
La journée de travail va-t-elle redevenir une question sociale?
Que signifie travailler dans la grande distribution aujourd'hui? En Suisse, deux géants se partagent la quasi-totalité du marché. Pour tenir la concurrence, ils intensifient le travail, exigent davantage de disponibilité de la part de leurs employé·e·s et déqualifient certains postes. Dans ce contexte, comment les responsables de magasin atteignent-ils les objectifs de rentabilité malgré les contraintes ? Comment les caissières font-elles face à l'automatisation croissante de leur métier ? Ou encore, comment les travailleuses et travailleurs de rayon concilient-ils les contacts avec la clientèle avec des contraintes temporelles de plus en plus fortes ?Cette enquête est basée sur 78 entretiens réalisés auprès de dirigeants, de travailleuses et travailleurs de divers échelons hiérarchiques et de secrétaires syndicaux. Elle met en évidence une réorganisation du travail à tous les échelons et interroge la place de la journée de travail dans notre société.L'ouvrage inclut une préface de Jean-Michel Bonvin, professeur de sociologie à l'Université de Genève.
Invitation à un voyage ethnographique dans le monde du hardcore, cet ouvrage explore la pluralité des pratiques qui sous-tendent l'existence de cette " subculture musicale ". Une minutieuse enquête multisituée et itinérante de plus de dix ans permet à l'auteur de conduire le lecteur dans les galeries les plus locales de cette scène underground. Du quatrième sous-sol d'un club de Yokohama, à une cabane isolée du campus de l'Université de San Diego en passant par Göteborg, Tokyo, Genève ou Lyon, tout un ensemble de logiques et de conventions esthétiques, idéologiques, discursives et kinésiques propres y sont décrites et analysées.Apparu sur la côte est des États-Unis au début des années 1980, le hardcore trouve ses principales origines dans le punk, dont il constitue une forme de radicalisation, aussi bien d'un point de vue musical qu'idéologique. Alors que ses ramifications s'étendent à une échelle quasi globale, ce monde demeure pourtant méconnu du grand public et n'a que très peu suscité l'intérêt des sciences sociales ou de la presse, si ce n'est pour pointer ses aspects les plus spectaculaires : agressivité exacerbée, musique électrique, positionnements idéologiques en opposition au " système dominant ". Cet ouvrage entend ainsi dépasser ces représentations caricaturales et poser un regard anthropologique sur le quotidien de ses adeptes, mais aussi sur l'ensemble des médiations collectivement déployées pour construire le monde du hardcore.Alain Mueller, docteur en anthropologie, a été chercheur associé au Center for Ethnography de l'Université de Californie-Irvine et à l'Université de Genève. Il est actuellement chargé d'enseignement à l'Institut d'ethnologie de l'Université de Neuchâtel. Ses questionnements actuels portent sur les enjeux épistémologiques de la pratique ethnographique, sur la formation de collectifs quasi globaux, ainsi que sur la construction de nouvelles formes de savoir sur et par le corps.
Cet ouvrage revisite la " question carcérale " en décortiquant ses enjeux contemporains. En Suisse comme en Europe, la délinquance juvénile attise les sensibilités publiques et nourrit les discours sécuritaires. Parallèlement, les mineur·e·s sont progressivement reconnus comme des sujets de droit, dont il faut protéger l'intégrité physique et morale. Ce contexte politique et moral contraint les institutions d'enfermement à garantir plus de " dignité " dans la vie quotidienne des jeunes (réduction des temps d'encellulement, prise en charge pluridisciplinaire), tout en imposant davantage de " fermeté " (renforcement des aménagements sécuritaires, sanctions disciplinaires).Les auteur·e·s explorent cette ambivalence à partir d'une enquête de terrain réalisée dans un centre éducatif fermé de Suisse romande. Comment les acteurs professionnels s'approprient-ils leur espace de travail? Quelle raison d'être confèrent-ils à leur mission professionnelle? L'ouvrage analyse les rivalités de territoires, met en évidence la diversité des conceptions éducatives et les différents rapports de l'institution à l'environnement extérieur. Il s'attache ainsi à saisir les formes de recomposition de l'économie morale de l'enfermement des jeunes. Cette analyse sociologique de la justice pénale des mineur·e·s " par le bas " souligne combien les pratiques de l'État, dans cet univers particulier, s'expriment d'abord par le travail de ses agents.
Négociations autours de la présence publique des communautés religieuses
Ces deux dernières décennies, l'enseignement de la religion dans les écoles suisses a fait l'objet de profondes réformes qui ont abouti, dans la majorité des cantons, à l'introduction d'un cours en matière de religions sous la responsabilité de l'État. L'attribution de ces nouvelles compétences à l'État n'a pas manqué de susciter des réactions auprès des communautés religieuses et a stimulé une réflexion sur le rôle qu'elles imaginent pour elles-mêmes dans la société et au sein des institutions publiques. Sur la base de quarante entretiens conduits avec des représentants de différentes communautés religieuses dans quatre cantons latins, cette étude discute, de façon typologique, les stratégies employées par des acteurs religieux pour défendre leurs positions dans l'espace public. À partir de cette analyse, l'ouvrage propose des instruments pour réfléchir, de manière nuancée, sur l'évolution des rapports entre les communautés religieuses et la société ainsi que sur les cadres théoriques d'une sociologie des religions dans l'espace public.Andrea Rota, docteur ès lettres, a étudié la science des religions, l'histoire contemporaine et l'anthropologie sociale à l'Université de Fribourg. Il a travaillé à l'Université de Bayreuth et est actuellement assistant postdoctoral aux universités de Berne et de Fribourg.
Selon la Constitution helvétique, " l'Assemblée fédérale est l'autorité suprême de la Confédération, sous réserve des droits du peuple et des cantons ". Malgré cette centralité, on connaît peu l'évolution des profils des parlementaires et l'histoire des réformes du législatif fédéral. Pour combler ces lacunes scientifiques, l'ouvrage propose d'abord une analyse historique des principales réformes portant sur la démocratisation du recrutement parlementaire et sur la professionnalisation du Parlement.Pour en évaluer l'impact, l'auteur dresse ensuite un portrait collectif des membres des deux Chambres, retraçant les continuités et les ruptures dans leurs profils socioprofessionnels entre 1910 et 2016. Il en résulte une riche biographie qui permet de réfléchir concrètement à la démocratisation du Parlement helvétique et à ses diverses mutations au fil d'un siècle. Ce travail a obtenu un prix de la Faculté des SSP à l'Université de Lausanne ainsi qu'un prix d'encouragement de la Société suisse pour les questions parlementaires.Andrea Pilotti est docteur en science politique de l'Université de Lausanne. Il est actuellement responsable de recherche à l'Observatoire de la vie politique régionale de l'Université de Lausanne (Ovpr). Il est également membre de l'Observatoire des élites suisses (Obelis). Il poursuit ses recherches sur le Parlement fédéral et codirige un projet de recherche, financé par le Fonds national suisse, sur les transformations urbaines de quatre villes suisses et l'évolution du profil de leurs élus locaux depuis les années 1940.
Enquête auprès d'agriculteurs, d'ingénieurs et de directeurs de ressources humaines exerçant en Suisse
Le vécu au travail façonne-t-il aujourd'hui les représentations sociopolitiques des individus? L'enquête qualitative menée au sein de trois groupes professionnels montre que les activités professionnelles alimentent les jugements portés sur la société et la politique. Les ingénieurs conçoivent la hiérarchie sociale et les choix politiques à l'aune de leur formation scientifique, axée vers la technique ou le management. Les agriculteurs se démarquent plus ou moins des loyautés politiques locales selon le type d'agriculture qu'ils privilégient pour assurer leur futur. En politique comme dans leur profession, les DRH valorisent une position de surplomb synthétisant des points de vue antagonistes. Comparant ces " ethos professionnels ", l'ouvrage relativise les constats de la dissolution des appartenances professionnelles et de l'individualisation des opinions. Il examine les modalités d'organisation du travail et de la concurrence, les trajectoires et les réseaux de sociabilités pour saisir les logiques de production des opinions propres à chaque groupe et leurs différenciations internes.Muriel Surdez est professeure au Département des sciences sociales de l'Université de Fribourg. Elle travaille sur les groupes professionnels et leurs rapports au politique et à l'action publique.Eric Zufferey est assistant diplômé et doctorant au Département des sciences sociales de l'Université de Fribourg. Sa thèse, en co-tutelle entre les Université de Fribourg et de Lille 1, porte sur la professionnalisation et la politisation des hackers.Ivan Sainsaulieu est professeur de sociologie à l'Université de Lille 1, membre du laboratoire Clersé. En tant que sociologue du travail, il est spécialiste de la coordination au travail et de la sociologie de l'hôpital.Fabrice Plomb est maître d'enseignement et de recherche au Département des sciences sociales de l'Université de Fribourg. Ses recherches récentes concernent la socialisation économique des jeunes, dans une perspective de sociologie de la jeunesse et de sociologie économique.Francesca Poglia Mileti est professeure de sociologie au Département des sciences sociales de l'Université de Fribourg. Ses domaines de spécialisation sont les migrations et les relations interethniques, la jeunesse, le lien entre travail et politique.
Histoire de la gouvernance d'entreprise suisse (1880–2010)
Du grounding de Swissair au scandale des rémunérations des dirigeants en passant par le marasme touchant certains fleurons de l'économie nationale, les enjeux de la gouvernance d'entreprise helvétique sont depuis la fin des années 1990 d'une actualité brûlante. Ce livre offre un éclairage historique de ces enjeux en analysant l'évolution du cadre légal et des pratiques en matière de gouvernance d'entreprise au cours du XXe siècle. Les auteurs mettent d'abord en évidence la consolidation progressive de la " forteresse des Alpes ", caractérisée par la concentration du pouvoir entre les mains d'un cercle restreint d'acteurs (gros actionnaires historiques et dirigeants des grandes sociétés et banques). L'ouvrage décrit ensuite les transformations radicales de ce modèle au cours des vingt-cinq dernières années sous l'effet de la libéralisation des marchés financiers et de l'affirmation de nouveaux acteurs, investisseurs institutionnels et raiders notamment. Cette redéfinition de la gouvernance d'entreprise, dès lors davantage orientée vers la satisfaction des actionnaires, s'est accompagnée d'une transformation du profil des élites économiques.Thomas David est professeur à la Faculté des sciences sociales et politiques de l'Université de Lausanne et directeur du Collège des Humanités à l'EPFL.André Mach est maître d'enseignement et de recherche à la Faculté des sciences sociales et politiques de l'Université de Lausanne.Martin Lüpold, historien, est archiviste aux Archives économiques suisses et bibliothécaire à la Bibliothèque universitaire de Bâle.Gerhard Schnyder est senior lecturer à la Faculty of Social Science and Public Policy au King's College de Londres.
Alors que le big data fait les grands titres de l'actualité, cet ouvrage montre en quoi la collecte massive de données mérite d'être analysée sociologiquement. Sami Coll propose ici une analyse détaillée des rouages d'un système de surveillance: les dispositifs de fidélisation dans la grande distribution. En mobilisant des concepts-clés issus de la sociologie, ce livre permet de découvrir les efforts des entreprises pour mieux nous connaître et nous surveiller. D'une part les mécanismes qui incitent les clients à adopter leurs cartes et qui les disciplinent pour qu'ils les utilisent, et d'autre part les stratégies marketing reposant sur les algorithmes de forage des données qui sont au centre du big data. Cette compréhension fine de la consommation sous surveillance mène l'auteur à proposer une discussion éclairante sur la validité de la notion de " sphère privée " dans notre société et va jusqu'à suggérer que la sacro-sainte " sphère privée " n'est plus seulement un outil de protection, mais qu'elle devient aussi l'une des meilleures alliées de la surveillance.Tout en offrant, pour la première fois en français, une véritable introduction aux études de la surveillance des consommateurs, l'ouvrage formule plus globalement une théorisation du contrôle social et des modalités de régulations sociales qui s'opèrent par le biais des pratiques de consommation.
Causes et conséquences des processus cognitifs de formation de l'opinion en Suisse lors des votations fédérales
Comment les citoyens raisonnent-ils lorsqu'ils doivent prendre une décision de vote? Cet ouvrage présente des modèles, en provenance de la littérature en psychologie cognitive, qui décrivent la formation de l'opinion comme une tension entre désir de simplifier la tâche et volonté de s'investir dans une recherche systématique d'informations. Appuyé sur des données de sondage et sur une base de données originale documentant la nature et le contenu des campagnes référendaires en Suisse (1999–2005), cet ouvrage commence par montrer l'utilisation des différents processus de formation de l'opinion par les citoyens suisses, puis étudie les conditions sous lesquelles un raisonnement systématique est préféré à une prise de décision simplifiée. Dans ce sens, une attention particulière est donnée à la fois aux niveaux de " sophistication " des processus de formation des opinions individuelles et aux contenus des campagnes politiques qui précèdent les scrutins. L'analyse montre ainsi que les racines du raisonnement des citoyens se trouvent tant dans leurs prédispositions que dans la nature de l'information politique auxquels ils sont confrontés. Pour finir, le livre propose une discussion sur les effets des processus cognitifs activés par les citoyens sur la qualité finale de leur décision, notamment en termes de " vote correct " et d'absence d'ambivalence.Alessandro Nai, docteur en science politique, est Maître Assistant et chercheur au Département de Science Politique et Relations Internationales (DSPRI) de l'Université de Genève et chargé de cours à l'Institut d'Etudes Politiques et Internationales (IEPI) de l'Université de Lausanne. Membre du comité scientifique des enquêtes VOX, il étudie le comportement cognitif des citoyens, l'interaction entre prédispositions et émotions et l'influence des campagnes politiques. Il codirige actuellement un projet de recherche du Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique, sur les causes et les conséquences du negative campaigning dans le contexte suisse.