L'École d'histoire de l'art et d'archéologie de la Sorbonne
Cet ouvrage retrace le parcours de l'École d'histoire de l'art et d'archéologie de la Sorbonne (EHAAS) de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, depuis sa création en 1971. Il met en exergue le dynamisme pédagogique et scientifique d'une composante " unie dans sa diversité ", ainsi que la vitalité des nombreuses entités de recherche qui lui sont adossées.Après avoir rappelé les conditions, parfois improbables, de sa création et l'histoire de ses multiples implantations (Institut d'art et d'archéologie, Maison de l'archéologie et de l'ethnologie à Nanterre, Galerie Colbert...), ce livre présente l'évolution des diplômes et des collections pédagogiques et scientifiques, puis la structuration de la recherche à travers ses laboratoires, centres, écoles doctorales et projets d'excellence. Le cœur du volume est ensuite consacré à la présentation des aires chrono-culturelles et des spécialités qui constituent la richesse et l'originalité de la composante, de la méthodologie et de la préhistoire à l'histoire de l'art contemporain et à la photographie, en passant par les mondes antiques, médiévaux, modernes, et les grandes aires culturelles (Amériques, Afrique, Océanie, Orient...).Ce volume collectif est le fruit des contributions de plus de cinquante enseignants-chercheurs et chercheurs. Pour raconter cette histoire sur cinq décennies, la mémoire des acteurs et des témoins a été sollicitée, sous la forme de témoignages, afin de pallier des archives institutionnelles souvent lacunaires.Unie dans sa diversité, c'est l'identité d'une composante qui a su faire dialoguer l'histoire de l'art, l'archéologie et la conservation-restauration, croiser les approches méthodologiques, décloisonner les savoirs et penser son avenir dans un paysage universitaire en constante recomposition.
Les gravures de Piranèse agrandissent ou réduisent à plaisir les monuments, elles jouent de l'infiniment grand et de l'infiniment petit, elles tordent les perspectives et modulent les premiers plans comme si le graveur, conscient de ses effets, ployait les monuments à son propre plaisir pour les faire parler à sa place.
Pourquoi un paradigme devient-il caduc s'il ne trouve moyen de se régénérer ? Cette question s'applique particulièrement au modèle grec dont l'art français s'est nourri tout au long du XIXe siècle, depuis l'apprentissage des artistes jusqu'aux normes institutionnelles, des imaginaires singuliers aux modes du marché, voire aux productions populaires. Entre la chute de l'Empire et la veille de la Première guerre mondiale, quantités de documents et d'œuvres donnent à comprendre la réception de l'archéologie grecque par les peintres et les sculpteurs. En croisant l'histoire de cette science avec la sphère artistique, en interprétant les créations et les écrits de personnalités aussi diverses qu'Ingres, Pradier, David d'Angers, Papety, Gérôme, Moreau, Étex, Rodin, Bourdelle ou Duchamp-Villon, ce livre présente les stades d'une évolution radicale du modèle grec, en théorie comme en pratique. S'éclairent ainsi les raisons et les modalités d'un basculement majeur: en un siècle le modèle apollinien, hérité du néoclassicisme et conforté par les marbres du Parthénon, finit par céder le pas au modèle archaïque, manifesté avec éclat dans la stylisation formelle de la sculpture moderne.
Collectionneurs, savants, restaurateurs aux XVIIIe et XIXe siècles
Collectionner, étudier, restaurer: trop souvent dissociées dans les travaux consacrés au devenir moderne de l'antique, ces trois pratiques étroitement liées au cours du temps n'ont cessé de s'influencer et de se féconder, dans le cadre de réseaux européens particulièrement actifs autour de l'objet de fascination et de passion qu'a représenté le vase peint – qu'il soit d'origine grecque ou étrusque – durant les XVIIIe et XIXe siècles. L'intérêt porté ces dernières années, un peu partout en Europe, à l'histoire patrimoniale et culturelle du vase antique a été à la source, à l'Institut national d'histoire de l'art (INHA), d'un programme de recherches clôturé par un colloque international les 31 mai et 1er juin 2011. Celui-ci a réuni vingt-cinq participants, spécialistes de la céramologie antique, de l'histoire de l'art moderne, de l'étude scientifique des matériaux du patrimoine ainsi que de l'histoire de la restauration?; leurs approches sont réunies ici. Parmi les thèmes abordés figurent l'étude de personnalités marquantes qui ont animé les réseaux du collectionnisme et de la restauration en Europe, aux XVIIIe et XIXe siècles, les différents contextes de la formation des collections – et notamment de celles formées en Italie et parvenues en Europe centrale et en Russie –, la diversité des approches matérielles et leur rôle dans l'histoire de la " fabrique " moderne des objets. Le volume s'achève sur une discussion interdisciplinaire consacrée au cratère de Lasimos (musée du Louvre), un vase emblématique de la plupart des questions posées par ce nouveau champ de recherches: cette étude de cas illustre tout l'intérêt d'une méthodologie fondée sur une approche globale de l'objet.
L'artisanat marocain est immanquablement associé à une image féerique au centre de laquelle trônent des artisans aux savoir-faire ancestraux. Spécialisés dans la confection d'ustensiles de ménage et de mobilier en laiton, les artisans dinandiers de Fès n'échappent pas à cette vision stéréotypée. Cependant, la réalité de la majorité des dinandiers et des artisans marocains ne se réduit pas à celle de la poignée de travailleurs généralement mis en avant pour faire montre du génie artisanal.Dans ce riche ouvrage, à la fois de recherche, d'érudition et d'expression esthétique, Baptiste Buob donne à voir et à penser le travail des artisans dans sa complexité et son évolution en s'éloignant des pistes erronées de la tradition ou d'une description misérabiliste.L'argument problématique majeur est de démonter le masque idéologique qui, sous le nom d'artisanat, cache des conditions de vie et de travail très dures. Une telle position d'anthropologie critique n'exclut pas une approche très descriptive et analytique du métier.Baptiste Buob pratique ici un exercice devenu rare qui consiste à " tourner autour " de son objet, à en explorer les facettes, les dimensions économiques, sociales, historiques et techniques, ainsi que les conceptions vernaculaires des artisans.Étude de référence sur les dinandiers de Fès, cet ouvrage dresse un portrait éloquent de la situation contemporaine de bien des artisans pris en tenaille entre la patrimonialisation de leurs produits et l'évolution capitaliste de leur industrie.Les quatre films du DVD qui accompagnent l'ouvrage composent bien plus que de simples illustrations : films et livre sont à la fois autonomes et complémentaires. L'enquête et la réalisation filmiques ont été le principal instrument d'investigation, le pivot de la recherche, car ce que décrivent les films est à la base de l'édifice de la dinanderie : le travail humain, le geste et l'objet travaillé.
Typologie, répartition géographique et histoire des instruments à monder le riz
En Occident, l'idée de céréale évoque spontanément celles de moulin, de farine, de pain, etc. Pourtant, à la différence du blé, du froment ou du seigle, il est une céréale qui nous est familière et qui n'a pas vocation à être moulue : le riz.Céréale à "grain vêtu", le riz brut ou paddy (épillet), grain récolté et égrené, est recouvert de deux pellicules : la balle et le tégument qui enveloppent la partie ordinairement consommée, l'albumen. Sauf dans le cas exceptionnel de la consommation de riz complet (caryopse), ces deux pellicules sont dépouillées avant la cuisson. On appelle "décorticage" la séparation de la balle du paddy, "blanchiment" le détachement du tégument, et "mondage" l'ensemble des deux opérations.Souvent confondues avec l'usinage des agronomes – qui désigne en réalité le traitement industriel effectué dans les rizeries – les techniques traditionnelles du mondage conjuguent des savoir-faire précis et délicats, aujourd'hui tombés dans l'oubli. Pour les riziculteurs asiatiques de l'époque médiévale et moderne, le mondage du riz était une occupation quotidienne trop banale pour mériter d'être décrite ou commentée. Les savants avaient eux aussi tendance à négliger le sujet. Ainsi, au début du 19e siècle, alors que les instruments traditionnels et les techniques paysannes ou artisanales sont en voie de disparition, seul un petit nombre de descriptions subsiste : extrêmement disséminées, souvent sommaires ou fragmentaires.Au gré d'un remarquable travail d'érudition et d'analyse, Yoshio Abé reconstitue pour la première fois ces instruments et ces techniques. Élaborant leur typologie, considérant leur répartition géographique à travers le monde, l'histoire de leur diffusion et leur évolution, il nous plonge dans la réalité quotidienne de ce qu'ont été les civilisations du riz si magistralement décrites par René Dumont et Pierre Gourou.
Regards anthropologiques sur la dynamique des savoirs et de la production. Cévennes 1800-1960
La sériciculture, en d'autres termes l'élevage des vers à soie, est pratiquée dans les Cévennes depuis le 13e siècle. L'auteure en retrace la mémoire, des débuts du 19e siècle jusqu'aux années 1960. Mais elle fait davantage que relater des savoir-faire. Elle restitue cette pratique dans ses dimensions économique, sociale et symbolique. Après avoir fait l'archéologie des connaissances et des savoir-faire dans la sériciculture, elle met en évidence le rôle prépondérant des femmes dans l'"éducation" des vers à soie, des magnans. Son analyse de l'organisation sociale montre les relations complexes qui lient les éleveurs et les filateurs. Les continuités et les mutations de la société cévenole sont saisies dans une activité qui apparaît alors comme une des clés de voûte de la vie sociale et économique. Françoise Clavairolle n'identifie cependant pas l'activité séricicole avec la culture cévenole. Analysant le système technique dans son évolution socio-historique, elle examine la disparition de cette activité et les conditions de son renouveau.
L'anthropologie indianiste a trop longtemps été guidée par l'idée que la culture matérielle appartenait aux tribus et les institutions sociales et culturelles aux castes, évacuant ainsi la dimension sociale des faits techniques. A l'opposé de cette conception, le livre déploie la complexité, la densité sociale et intellectuelle des techniques et des savoir-faire, afin de donner à ceux-ci leur place dans la vie culturelle et sociales des hommes.