L'œil des libraires : les Hommes et la mort

Les libraires du Comptoir vous proposent des sélections thématiques. Aujourd'hui, c'est à l'univers du funéraire que nous prêtons attention, entre rites, pratiques et conceptions diverses à travers le temps et l'espace.

La période de la Toussaint invite chaque année au recueillement, à la mémoire et au souvenir de ceux qui nous ont quittés. Plus généralement, elle nous amène à réfléchir au cycle de la vie et de la mort, et à nous intéresser aux manières dont ce phénomène est considéré et traité partout dans le monde. À travers les siècles ou par-delà les frontières, le rapport de la société aux défunts varie énormément. C'est ce que nos libraires nous invitent aujourd'hui à découvrir.

 

Mort et pleurs rituels, d'Ernesto De Martino (Éditions de l'EHESS)

Ernesto De Martino étudie le rapport entre la mort humaine, en tant qu'événement naturel, et le rite de la plainte funèbre lui conférant un sens culturel. Une traduction inédite sur la crise du deuil dans le monde antique, qui s'achève par un audacieux Atlas illustré des pleurs. L'existence humaine obéit à un équilibre fragile, toujours menacé par une crise sans horizon: la mort d'une personne aimée. La perte irréversible ouvre la voie à l'éloignement du monde, au délire du déni, à une fureur destructrice. D'où vient le besoin de refuser la mort dans sa scandaleuse gratuité, d'offrir le repos au défunt grâce à l'élaboration rituelle du deuil ? C'est tout l'enjeu de ce grand classique de l'anthropologie, enfin traduit en français.

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Les Vivants et les morts dans les sociétés médiévales, Collectif (Éditions de la Sorbonne)

En tenant son LXVIIIe congrès à Jérusalem, ville-sanctuaire et ville-cimetière où tant d'hommes et de femmes sont venus ou ont espéré mourir au Moyen Âge, la Société des historiens médiévistes de l'Enseignement supérieur public a souhaité interroger les relations entre les vivants et les morts en un lieu placé au coeur des croyances et des attentes eschatologiques des trois grandes traditions monothéistes. Attentifs à la diversité des mondes chrétien, juif et musulman qui se croisent dans l'histoire de Jérusalem, les auteurs ont mobilisé l'ensemble des traces laissées par les gestes, les pratiques et les croyances des hommes et des femmes du Moyen Âge à l'égard de leurs morts: de l'étude archéologique des sépultures à leurs représentations, de l'épigraphie funéraire à la mémoire archivistique des défunts, du commentaire des écritures saintes au récit des morts illustres ou anonymes. Ainsi sont mis en lumière la prise en charge des défunts, l'espace qui leur est assigné en propre ou en partage dans la société de leur temps, l'économie des échanges matériels et mémoriels entre morts et vivants, les croyances enfin qui investissent les multiples temporalités de leurs relations de part et d'autre de la tombe. Le Moyen Âge n'a cessé de bruisser du commerce des vivants et des morts: ce volume donne à entendre cette conversation ininterrompue.

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Les Sources du funéraire, de Bruno Bertherat (Éditions Universitaires d'Avignon)

Qu'est-ce que le funéraire ? C'est un ensemble, nous dit-on ici, de discours, de représentations et de pratiques sociales autour de la mort, des funérailles, du deuil et de la mémoire des disparus. Et pourquoi ce funéraire est-il si important ? Parce qu'il perpétue la mémoire d'une communauté, écarte la rupture entre la société des vivants et celle des morts. Pour la première fois, une équipe de chercheurs en sciences humaines et sociales et de conservateurs du patrimoine brasse les sources du funéraire, anciennes et nouvelles, en livre les clés d'accès, dévoile les enjeux et l'importance de ce patrimoine pour les sociétés à venir.

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L' Invention des morts, de Grégory Delaplace (Centre d'Études Mongoles et Sibériennes (EPHE))

L'Invention des morts explore les relations que les Mongols entretiennent au quotidien avec leurs défunts. S'appuyant sur une enquête menée chez les pasteurs nomades Dörvöd et dans la capitale Ulaanbaatar de 1999 à 2005, Grégory Delaplace montre que les morts sont au centre de pratiques discrètes, par lesquelles éleveurs et citadins embrassent ou rejettent des idéologies modernistes et socialisent un environnement peuplé de « maîtres » invisibles. L'étude successive des sépultures, des histoires de fantômes et des usages sociaux de la photographie conduit le lecteur à travers les multiples procédés et petites trouvailles tactiques par lesquels les morts sont « inventés » comme les partenaires de relations formelles ou intimes qui subvertissent les cadres institutionnels imposés par l'État et le clergé. En décrivant à travers des matériaux originaux l'art de vivre avec les morts dans la Mongolie d'aujourd'hui, ce livre ne comble pas seulement un manque dans la littérature ethnographique régionale, il propose une méthode renouvelée pour l'anthropologie. Prix de thèse du Musée du Quai Branly 2008.

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Tombes et pratiques funéraires protohistoriques des Grands Causses du Gévaudan (Aveyron, Gard, Lozère), de Bernard Dedet (Éditions de la MSH)

Cet inventaire normalisé et critique présente deux cent quarante gisements funéraires du Bronze final au 5e siècle av. J.-C. L'étude des pratiques funéraires révèle certains aspects des structures d'une société sans écriture et suggère l'existence de représentations collectives de la mort et de l'au-delà.

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Mort et deuils en milieux scolaires, de Jacques Cherblanc et Christine Fawer Caputo (Éditions Alphil)

On a souvent du mal à associer la mort à l'école qu'on considère plutôt comme un lieu de vie, avec des jeunes en devenir. Pourtant, les établissements doivent parfois composer avec les drames et le deuil.Les textes rassemblés dans ce volume présentent les différentes situations auxquelles le monde scolaire doit parfois faire face (décès, maladies graves, expérience migratoire) et proposent des pistes d'accompagnement pour les acteurs éducatifs. Ces situations sont abordées en quatre volets.Agir quand un drame frappe l'école se demande comment agissent – ou devraient agir – les institutions en de telles circonstances. Décès d'un·e élève ou d'un·e enseignant·e, scolarité dans la maladie, gestion de l'absence et du deuil sont les situations privilégiées.Vivre et accompagner l'orphelinage en milieu scolaire évoque plusieurs facettes de la gestion du deuil de l'enfant scolarisé: outre plusieurs pistes de réflexion sur la condition d'orphelin, le rôle des enseignants et le vécu des élèves lors de ces événements est évoqué au travers d'enquêtes et témoignages.Deux contributions sont ensuite consacrées à un enjeu complexe qui interpelle différents types d'intervenants scolaires: Comprendre les deuils multiples des jeunes migrants scolarisés.Enfin, Éduquer et sensibiliser à la mort en milieu scolaire étudie la question de la mort comme tabou à dépasser: non seulement, comme le montrent les textes précédents, parce qu'elle appartient au cycle de la vie, mais encore parce que son évitement est aussi nuisible. Outre des études globales, plusieurs exemples concrets en vue de se réapproprier la pensée de ces moments-charnières sont présentés.

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Autour des morts de guerre, de Raphaëlle Branche, Nadine Picaudou et Pierre Vermeren (Éditions de la Sorbonne)

Alors que la guerre fait encore rage en Syrie et que les sociétés de la rive sud de la Méditerranée hésitent entre protestation ouverte et crainte de la violence d'État, il importe de saisir la place qu'occupent les morts de guerre dans ces pays du Proche et du Moyen-Orient, où ils paraissent si intimement liés à la culture politique. À chaque fois, ici comme ailleurs, que ce soit lors d'assassinats politiques, lors de massacres accompagnant une guerre civile ou sur des champs de bataille, il faut que les morts de guerre fassent sens, pour que leur potentiel de destruction soit affaibli. C'est pourquoi ils sont si importants à étudier pour comprendre ces sociétés car ils nous informent sur la fabrique du social, sur ses dynamiques de cohésion comme sur les tensions qui la traversent, notamment à l'occasion des processus de construction mémorielle dont ils sont l'objet. Beaucoup de ces morts sont des civils ; tous sont dits " martyrs ". L'omniprésence de cette figure confère aux morts de guerre une charge de sacralité religieuse qui les rattache à des univers symboliques nourris d'imaginaires religieux, ici essentiellement sunnite mais aussi chiite ou chrétien. Il importe de les regarder de près pour saisir l'épaisseur historique de ces constructions ainsi que leur intense imbrication avec les processus sociaux et politiques en cours.

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La Poésie funéraire épigraphique à Rome, d'Étienne Wolff (Presses universitaires de Rennes)

Sujet généralement peu abordé, l'étude de l'épigraphie funéraire permet pourtant une approche de la vie romaine par les couches inférieures ou médianes de la société. Elle ne s'occupe en effet pas seulement des notables, mais aussi des Romains et Romaines ordinaires, ignorés souvent de la littérature.

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La Mort, les Morts et l'Au-Delà dans le monde romain, de François Hinard et François Neveux (Presses universitaires de Caen)

Voir s'éteindre, exsangue, la toute jeune accouchée ; assister à l'agonie de son enfant, de son esclave ; partager le chagrin et l'isolement d'une famille en deuil ; éprouver l'horreur devant la décomposition d'un corps qu'on a connu ; calculer pour le fils qui vient de vous naître les probabilités de survie ; supputer les chances qu'on a de laisser derrière soi un " héritier " qui vous succède et qui, surtout, entretienne votre tombe ; imaginer, pour ses morts, pour soi aussi, un autre monde, nécessairement à l'image de celui-ci ; en un mot, regarder les autres, et donc s'imaginer mourir : voilà ce à quoi invite ce livre.Certes il s'agit là de la Rome antique. Mais, en fait, les choses sont-elles si différentes ? Oui, lorsqu'il s'agit seulement de calculs abstraits, d'analyses distanciées ; mais comment ne pas être saisi par l'angoisse, devant ces os blanchis que déterrent les archéologues ou en lisant les épitaphes que des vivants d'alors, qui sont morts aujourd'hui, peut-être sans épitaphe, ont fait graver pour dire leur douleur ou leur admiration ?

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Besoin de conseils ou de recommandations ? Nos libraires vous accueillent du mardi au vendredi de 13h à 19h au Comptoir, situé au 1er étage de la Fondation Maison des Sciences de l'Homme, 54 Boulevard Raspail - Paris 6. 

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