Au débouché d'évolutions qui affectent les sciences sociales depuis une vingtaine d'années, l'étude des normes offre aux historiens un vaste champ d'enquête. L'intégration du droit, l'élargissement du concept de norme au-delà du droit, le dépassement de la confrontation entre normes et pratiques sociales en termes d'application ou d'opposition et la focalisation sur les pratiques productrices de normes ont ouvert des pistes nouvelles. C'est en suivant ces pistes que la norme est ici appréhendée en diverses " fabriques " – institutions, discours, images – au Moyen Âge et à l'époque moderne. Caractérisés par la pluralité des instances et des lieux de production des normes, ces siècles constituent un terrain propice à l'élaboration d'une réflexion comparative sur la normativité. Conjuguant les compétences de spécialistes d'histoire du droit, de la justice, d'histoire intellectuelle, religieuse et sociale, les treize études réunies dans ce volume visitent quatre grandes " fabriques de la norme " : les lieux d'élaboration des normes savantes, les " fabriques " de la loi, puis du procès, celles, enfin, des images et des apparences. À la variété des lieux correspond celle des types documentaires, des lois royales aux livrets de pèlerinage en passant par les lettres de grâce, les statuts synodaux, les délibérations municipales, les sentences de tribunaux, les Quodlibets, les textes casuistiques, l'hagiographie. Outrepassant les frontières chronologiques et disciplinaires communes, ce volume associe à une réflexion historiographique sur la normativité des études précises de cas. Il manifeste, sans prétendre l'épuiser, la réelle productivité historique de l'étude des normes.