S'appuyant sur un large éventail de sources orales et d'archives en plusieurs langues collectées dans cinq pays, La Mouridiyya en marche retrace plus d'un demi-siècle d'histoire des Mourides, en mettant l'accent sur la mobilité et les transformations culturelles en milieu urbain. Cheikh Anta Babou s'inscrit dans la recherche émergente sur les migrations musulmanes transnationales en explorant la vie religieuse de cette confrérie sénégalaise à travers leurs migrations et leur installation dans certaines villes sénégalaises, ivoiriennes, gabonaises, françaises et américaines depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'à la première décennie du xxie siècle. En se concentrant sur leur utilisation de l'espace, il met en lumière les relations entre la création de lieux, l'identité religieuse et les comportements d'appartenance, à travers l'habillement, l'utilisation d'une musique dévotionnelle, et la composition de récits sacrés. La quête d'un espace pour soi et la création d'associations, surtout celles dévolues à la promotion des valeurs culturelles et religieuses, constituent l'un des moyens que les immigrants emploient pour se faire accepter et s'insérer dans la communauté citoyenne du pays d'accueil. Tout au long de l'ouvrage, il décrit les forces économiques et sociopolitiques qui ont alimenté ces mouvements de population, notamment la domination coloniale, les crises économiques de l'ère postcoloniale et les catastrophes naturelles.Ce travail fascinant sera autant apprécié des familiers de la mouridiyya que de ceux qui découvrent la dynamique de cet ordre soufi.
La fabrique du religieux en pays mandingue (Mali, Guinée, Côte d'Ivoire)
Entre un passé compliqué et un futur incertain, comment vivre au mieux avec soi-même ? Pour répondre à cette question, l'ouvrage explore les constructions de soi de trois types de spécialistes rituels mandingues : les donsow (les chasseurs), les basitigiw (les féticheurs) et les jinatigiw (les maîtresses des génies). Il analyse la relation entre ces spécialistes et les entités – êtres de la brousse, choses-dieux et génies urbains – que leur pratique fait émerger. Il vise à saisir, par ce biais, ce que fait le rituel, comment il le fait, et ainsi à améliorer notre compréhension de ce mode d'engagement particulier. Afin d'en appréhender le rôle dans la fabrique du religieux, le regard est porté sur la dimension matérielle de cette fabrique : ingrédients des sacrifices, couleurs des habits qui plaisent aux génies, tonalité baroque prisée par les " nouveaux entrepreneurs religieux " qui excellent dans l'usage du " faux authentique ", et, surtout, sur le corps des experts, qu'ils soient à la chasse, en transe, ou engagés dans un chair à chair avec certains objets-sujets ou avec des " personnes qui ne sont pas des personnes ". Le déplacement des conditions d'intentionnalité ou d'agentivité que ces spécialistes opèrent à travers leurs pratiques leur permet-il de modifier durablement leur rapport au monde, de se constituer en des sujets " virtuoses ", d'agrandir leurs marges de liberté ? Ces pratiques, qui contribuent à l'émergence de la sphère a-islamique, se constituant dès les années 1990 face aux pratiques associées à l'islam, modifient-elles les rapports de force et de genre en place dans les sociétés africaines de ce début du xxie siècle ?
Une autre histoire du Mali contemporain (1956-1991)
Depuis 2012, le Mali est plongé dans une crise qui semble s'enraciner. Le récit proposé ici se situe aux antipodes des représentations chaotiques diffusées à l'égard de ce pays africain. Ce livre raconte une histoire mixte, celle des combats multiples menés par les femmes et les hommes du Mali qui, en dépit de la répression, se sont révoltés, insurgé, mobilisés contre l'ordre établi et pour faire vivre leurs rêves. Situé à la croisée de l'histoire du genre et de la sociologie des mouvements sociaux, l'ouvrage propose une analyse inédite des dynamiques sexuées qui imprègnent les formes de l'action collective et de la manière dont l'engagement contribue à modifier les rapports de genre dans le Mali contemporain. De décolonisation en 1960 à la révolution de mars 1991, quatre décennies de luttes sociales et politiques ont façonné l'histoire éminemment non consensuelle de ce pays.
Si certains musées, comme le musée de l'Homme (Jean Rouch), le Quai Branly (Martin Gusinde) ou encore le musée d'Histoire naturelle (mission scientifique du Cap Horn), ont consacré des expositions et des publications à l'œuvre photographique d'ethnologues, apprentis ou confirmés, il n'existe aujourd'hui que peu d'ouvrages consacrés à une photographie contemporaine, qui se situerait au croisement de l'anthropologie, de la photo documentaire et de la photo d'art. C'est dans cet espace interstitiel que les photographies de Catherine De Clippel se déploient. Faite d'allers retours entre différentes disciplines, cultures, et époques, sa pratique photographique s'est plus particulièrement intéressée aux cultes vodous d'Afrique de l'Ouest. C'est en collaborant, à la fin des années 1980, avec les anthropologues Marc Augé, Jean-Paul Colleyn et Jean-Pierre Dozon, pour la réalisation d'une série de films documentaires, que Catherine De Clippel se forme progressivement à l'anthropologie et à ses pratiques. Elle en forgera une approche éminemment personnelle du terrain et du médium photographique.Le nouvel ouvrage que les éditions de la MSH consacrent au travail de Catherine De Clippel réunira quatre-vingts photographies, prises entre la fin des années 1980 et aujourd'hui, autour des cultes vodous au Togo et au Bénin, entre continuités et évolutions. Cet ouvrage, s'il est avant tout un livre de photographies, entend capter les différents aspects de l'œuvre photographique de Catherine De Clippel, dont le regard a été fortement influencé – si ce n'est ciselé – par son expérience du terrain ethnographique. De par sa collaboration avec une équipe de chercheurs, son travail photographique rend compte d'une véritable approche anthropologique de ses sujets. Un entretien avec la photographe, ainsi que deux textes, l'un se penchant sur la dimension historique, artistique et esthétique de ses images (écrit par le conservateur de musée et commissaire d'exposition François Cheval), et l'autre sur leur contexte anthropologique (Jean-Paul Colleyn, anthropologue) accompagneront les photos.
Au Burkina Faso, la " vie chère " occupe aujourd'hui une place centrale dans les difficultés matérielles et les sentiments d'injustice ressentis par les classes populaires. L'augmentation des cours de biens de consommation courante a ainsi suscité des mobilisations parfois violentes dans ce pays depuis le début des années 2000, et alimente également un mécontentement plus diffus à l'encontre des autorités jugées responsables des prix.À partir d'une enquête menée dans les quartiers populaires de villes burkinabè, l'auteur traite d'un phénomène peu étudié: la place grandissante des prix dans l'expression de la colère au sein de sociétés contemporaines. Cette colère est interrogée sous l'angle de la vie quotidienne et des représentations populaires de l'économie, sous celui de l'histoire de la politique des prix et des traces qu'elle a laissées dans les mémoires, et enfin sous celui de différentes formes de mobilisations (manifestations, émeutes, pillages). Au-delà du cas du Burkina Faso, cet ouvrage propose une réflexion plus générale sur l'évolution des modes de gouvernement et de leurs contestations à l'ère néolibérale.
Qu'en est-il aujourd'hui des actes de contestation, de résistance et d'émancipation par la photographie? À moitié déchirées, effacées, presque illisibles, des figures du passé resurgissent par des images retouchées, recomposées, remises en scène pour être mobilisées dans les luttes du présent.Ce numéro rend compte de l'extraordinaire malléabilité des matériaux photographiques. À l'ère numérique, un besoin grandissant de se réapproprier les images historiques se traduit par de multiples formes de remise en circulation, de réemploi, de transformation, souvent à l'encontre des intentions originelles de leurs producteurs.
L'archipel du Cap-Vert : risques, géopatrimoine et sociétés
Destination touristique de plus en plus recherchée, l'archipel du Cap-Vert, regroupement d'îles d'origine volcanique au large de l'Afrique occidentale, se transforme et se développe avec l'augmentation de la pression touristique sur son environnement. Cet accroissement démographique annuel et saisonnier entraîne ainsi une recrudescence des tensions entre nature et sociétés.Ce volume, tout en couleur (richement illustré de photos, de croquis et de cartes), s'interroge sur cette interaction environnement milieu/communautés humaines : sur les aléas, les risques naturels (volcanisme, glissement de terrain…), sur la vulnérabilité et la résilience des ressources naturelles et des populations, sur les notions de conservation de la nature et de géopatrimoine ainsi que sur la gestion de l'eau dans un archipel subtropical sec, aux fortes contraintes et variations climatiques, parfois extrêmes.
Ce livre parle de Dakar. Et de l'argent. À Dakar, l'argent est roi. Il est le revers de toutes les relations, des plus commerciales aux plus intimes.Ce livre parle des femmes. Et de l'argent. À Dakar, les femmes dépensent avec faste des sommes démesurées pour honorer des relations de parenté, en particulier à l'occasion des cérémonies de mariage et de naissance — ce que, paradoxalement, hommes et femmes dénoncent comme un gaspillage contraire à la rationalité économique et aux valeurs de l'islam.Ce livre parle d'anthropologie. Et d'argent. À Dakar, si la finance est reine, la vie sociale n'est pas pour autant soumise à la seule loi du marché: le système cérémoniel, qui associe étroitement échanges féminins et rituels religieux, y joue un rôle de premier plan.Nourri d'enquêtes de terrain menées dans un quartier populaire de l'agglomération dakaroise, l'ouvrage d'Ismaël Moya, en suivant la piste de l'argent, éclaire d'un jour nouveau la place de l'économie, les hiérarchies statutaires, la parenté et les rapports complexes entre hommes et femmes dans cette société musulmane. S'y dévoilent, au sein de la finance, les valeurs qui structurent la vie sociale d'une métropole africaine contemporaine.
Environnement et santé : où en est la géographie ?
L'actualité nous rappelle l'importance du lien entre santé et environnement. L'épidémie d'ébola, qui s'est déclenchée en Afrique de l'ouest en 2013-14, est un exemple déterminant de ce lien entre environnement et santé. La géographie, discipline où l'interaction entre l'homme et le milieu naturel offre un angle de réflexion inédit sur cette question, permet de découvrir une vision globalisée des maladies et de l'accès aux soins au niveau d'une population et donc d'un territoire, du local à l'international, de l'infection à la pandémie. Les auteurs s'interrogent donc, dans cette ouvrage tout en couleur (richement illustré de photos et de cartes), sur le rôle de la géographie dans la compréhension de l'évolution des maladies, bactéries, virus, de leurs expansions. Ils essaient d'expliquer comment mettre en place des solutions sanitaires acceptables par les populations. Dans ce livre sont traités la crise ébola 2013-2014, les trypanosomiases ou maladies du sommeil, les diarrhées infectieuses, le paludisme… mais aussi les inégalités de soin, la vulnérabilité des populations face aux risques de santé en France, en Europe et dans les pays de la ceinture tropicale.
La notion de santé globale s'impose dans les années 1990. Notion encore instable, elle comporte une charge polémique à l'encontre des organisations internationales jugées inaptes à prendre en charge les problèmes de santé mondiale, en particulier les nouvelles épidémies planétaires. Les acteurs appelés à prendre la relève sont dès lors les medias, les fonctions influents au plan international, les organisations non gouvernementales et les sociétés transnationales. Dans ce numéro, des anthropologues interrogent la santé globale à partir de leurs terrains. Ils mettent en lumière ses logiques entre santé publique et intérêts privés et dévoilent les processus d'imposition de normes. Ils analysent l'évolution des rapports de force au niveau des politiques locales et entre professionnels et malades.