Aux fondements des sociétés européennes et méditerranéennes
Les relations maternelles et paternelles apparaissent culturellement définies d'une manière qui alimente des débats renouvelés dans le contexte contemporain de développement des technologies de la procréation assistée. Les enjeux de ces débats prennent alors une nouvelle dimension. La définition et le calcul de la filiation n'interviennent pas seulement en effet dans le champ particulier de la parenté ; ils déterminent la transmission intergénérationnelle des biens matériels et symboliques, ainsi que des identités et des statuts, éventuellement des titres politiques ; ils relèvent simultanément de la codification du droit. Ce sont l'ensemble de ces traits de la filiation que brouillent les technologies modernes.Telles sont les questions qui sont à l'origine de cet ouvrage, organisé comme un recueil de textes auquel ont contribué des spécialistes de différentes disciplines : anthropologues, historiens, juristes…
L'ouvrage présente une somme importante du vocabulaire en usage dans la tribu des Ait Hadiddou du Haut Atlas oriental. La collecte a eu lieu dans plusieurs localités du pays de cette tribu entre 1981 et 1991 et principalement dans les villages suivants : Agdal, Amouguer, Aqdim, Imilchil, Outerbate, Timaryine. Le vocabulaire récolté couvre de nombreux champs qui relèvent des pratiques quotidiennes des villageois et, à ce titre, permet de renseigner sur les faits sociaux de la période où la collecte a eu lieu.Loin d'être exhaustif, ce lexique peut être un point de départ pour une recherche approfondie sur la vie du lexique dans la langue et sur la vie des villageois dans leur quotidien.
L'ouvrage est l'aboutissement de longues années de recherches sur les traditions littéraires orales ou écrites des Berbères d'Algérie. La poésie, les chants, les chansons sont les supports d'expression les plus efficaces pour permettre aux femmes, mais aussi aux hommes, de dire des choses qui ne se disent pas. Par ces moyens, on peut en effet s'exprimer tout en préservant la dignité de l'autre. L'auteure parle du désir et de la frustration, de ce qui est visible et de ce qui est caché, de ce qui est imaginaire et de ce qui est réel. Tous les protagonistes de la vie sociale sont ici partie prenante : les hommes, les femmes, les jeunes, les vieux, ceux qui sont inscrits dans le système et ceux qui ne le sont pas encore, ou qui ne le seront jamais.
Au Sahara occidental, entre les derniers contreforts de l'Anti-Atlas et l'océan Atlantique s'étend le pays Takna. Plaque tournante du commerce de longue distance, cet espace est depuis des temps reculés l'objet d'un étroit contrôle du territoire de la part des populations qui l'occupent. À l'encontre de l'historiographie contemporaine, héritière des chroniqueurs arabes du Moyen Âge, l'auteur appréhende cette zone géographique à partir des données archéologiques les plus récentes et attache une attention toute particulière aux sources locales : généalogies, fonds d'archives familiaux, registres comptables des maisons de commerce. Appliquant une méthode de lecture longitudinale, au plus près des documents, il dégage les outils indispensables — et jusqu'ici ignorés — pour comprendre et analyser la dynamique des alliances économiques et politiques transsahariennes, du 16e siècle à nos jours. La combinaison des modes de vie offre une approche pertinente du lien des tribus avec le sol. L'espace n'est plus seulement topographique : ses frontières sont aussi sociales. Le modèle anthropologique préside ainsi aux stratégies de contrôle du territoire et trouve son expression dans l'affirmation des solidarités.
Rituels et représentations de l'honneur chez les Aït Khebbach (Tafilalt)
Au sud-est du Maroc, les Aït Khebbach, groupe berbère naguère nomade, sont aujourd'hui sédentarisés dans une enclave saharienne. Contrastant avec cette situation actuelle étriquée, on retrouve, dans leurs représentations, leur souvenir d'avoir été des guerriers libres et puissants. L'auteure a entrepris d'observer les activités quotidiennes de la tribu. Elle distingue les domaines propres à l'activité masculine - l'irrigation et la culture des champs, l'attribution des terres - de ceux du monde féminin, comme le transport de l'eau ou la confection du pain. Elle porte son regard sur la vie familiale, les cérémonies de mariage et les rituels d'alliance. Elle écoute les mots (prononcés ou évités) et tous les récits qui soutiennent la mémoire collective (récits de fondation et mythe d'origine). Au-delà des pratiques et des interactions sociales observables, elle met au jour un niveau latent de la culture, référence inconsciente et subie qui agit comme un fait de structure.
Les Ghoujdama, tribu du Haut Atlas, par leur ancrage dans l'histoire et leur capacité d'adaptation au monde moderne, constituent un cas exemplaire pour comprendre le Maroc et par-delà le monde rural maghrébin. Par une étude historique solide, l'auteur nous montre les Ghoujdama à l'aube du 20e siècle, sous la double domination du glaoui et du Protectorat, et depuis l'indépendance. Grâce à la connaissance intime de ce milieu dont il est issu, Ali Amahan, dans le sillage de Robert Montagne, Jacques Berque, Paul Pascon, Pierre Bourdieu, aborde avec acuité et justesse l'analyse de leurs mutations sociales. Il révèle les mécanismes enfouis dans les structures sociales et mentales, dévoile la dynamique spécifique qui incite au changement, mais aussi à la résistance, et montre que la confrontation entre changement et permanence n'est en fait que la juxtaposition de deux systèmes, l'un moderne et puissant, l'autre traditionnel et ancestral. Ces systèmes se complètent et ne s'opposent que rarement ; ils s'appuient mutuellement l'un sur l'autre pour perdurer et évoluer.
De par sa position privilégiée, algérienne et française, l'auteur nous restitue l'histoire sociale et économique de l'Algérie d'un double point de vue : celui du colonisateur et celui du colonisé. Il tente de combler les lacunes dans le domaine économique et social que comporte l'histoire de l'Algérie au 20e siècle, en procédant à l'étude des conditions sociales, politiques et culturelles dans lesquelles l'histoire de l'économie de l'Algérie est née, a évolué et s'est transformée entre 1914 et 1988. L'auteur nous montre que la colonisation n'est pas seulement une domination politique, qu'elle est aussi un phénomène à faces multiples et prend tous les aspects de la vie des colonisés, y compris ceux qui touchent à la culture et à ce que l'on appelle aujourd'hui identité. Or, et c'est là une des ambiguïtés du phénomène, la culture à la française a été l'une des forces de la décolonisation. Cette synthèse de l'histoire de l'Algérie éclaire les derniers événements (1990-1995) marqués par les luttes et déchirements entre les différentes tendances politiques.
Dans l'histoire de l'humanité ancienne, l'Algérie occupe une place privilégiée : par la qualité et la quantité de ses gisements paléolithiques et protohistoriques et par la diversité de son espace géographique. Le livre reconstitue en un langage clair et accessible à tous, la pré- et proto-histoire de l'Algérie, à partir des travaux de la recherche algérienne de ces 30 et 40 dernières années. Ainsi sur près de 2 millions d'années, depuis les rives de la Méditerranée jusqu'au voisinage du Nil, l'auteure donne une vision globale de la vie qui s'y déroule, de l'Atlanthrope (le plus vieil Algérien connu) et de ses descendants, des techniques et de la production des artefacts sans oublier les mutations environnementales. Tout en intégrant les apports externes, elle accorde un poids essentiel aux processus de dynamique interne, aptes à façonner hommes et pierres.