Colloque "Aires protégées insulaires et littorales tropicales", Nouméa (Nouvelle-Calédonie), 30 et 31 oct. 2001
Récifs coralliens, lagons, mangroves, avec le cortège de formes de vie qui leur sont attachées constituent des milieux originaux, soumis à des aléas spécifiques. Au-delà des spécificités locales des Galapagos, du Sud-Ouest malgache ou de la Nouvelle-Calédonie (entre autres cas abordés dans l'ouvrage) existe-t-il des caractères propres aux aires protégées établies sur des îles et des littoraux tropicaux ? Quelles sont leurs fonctions ? Quel est le rôle des communautés locales concernées ? Quelles sont les dynamiques des différents milieux ? En une approche pluridisciplinaire, ces questions sont traitées par des contributions qui croisent analyses, indicateurs et outils variés.
Au Nord de la Polynésie française, l'archipel des Marquises (enua enana, "la terre des hommes") présente une topographie saisissante d'îles déchiquetées surgies de l'Océan Pacifique. Constitué de douze îles habitées pour la moitié, il dépend de l'extérieur, surtout de Tahiti. Ses 8 000 Marquisiens entretiennent avec force une culture originale au travers de chants, danses, tatouages, d'un artisanat créatif … Les touristes, peu nombreux (2 000 par an), ont la chance de partager d'intenses moments lors de manifestations comme le Festival des Marquises, où la population du Triangle maori (Hawaii, Nouvelle-Zélande, île de Pâques) se retrouve pour affirmer son identité culturelle. Économie éminemment artificielle, l'économie marquisienne est une économie de rente. L'archipel reçoit quelque 50 millions d'euros, représentant les investissements et dépenses de fonctionnement pour 1 500 ménages environ. Dans ces conditions, les ressources de transfert contrarient initiatives locales et projections à long terme. Les projets, à l'image des plans d'aménagement généraux, ont-ils un avenir dans le contexte du pacte de progrès ? Pour se développer, l'archipel peut privilégier son riche patrimoine, afin de générer une dynamique apte à favoriser un développement durable. Sa survie culturelle, politique et économique en dépend. La récente déconcentration (2002) aura-t-elle des effets bénéfiques et directs pour la population locale ?
Le kava est une boisson emblématique des îles du Pacifique, un marqueur de l'identité océanienne. Le breuvage, enivrant, s'obtient par le broyage des racines de kava, plante arbustive pérenne de la famille des pipéracées. Central dans les mythes fondateurs des sociétés indigènes, inscrit dans la pharmacopée autochtone et les pratiques divinatoires, le kava connaît depuis plusieurs décennies un très large développement. L'étude de géographie culturelle, alliant anthropologie, histoire et géographie, définit ici les circuits de la diffusion originelle du kava à travers le Pacifique et souligne les transformations des pratiques et des rites de sa consommation (des hameaux aux actuels bars à kava des grandes villes). Elle montre également l'avenir prometteur du kava pour la production agricole et le développement économique (produits pharmaceutiques entre autres) du monde océanien.
Étude basée sur les archives maristes, dont le propos est de fournir une approche complémentaire de l'histoire de Tonga. Elle nous fait découvrir une minorité polynésienne à qui le catholicisme a donné des éléments religieux, politique, culturel et l'identité sociale. La perspective historique qui résulte de l'établissement de la mission et du développement d'une communauté catholique permet d'établir la structure chronologique de ce travail. Le regard historiographique ajouté à l'étude chronologique permet de définir comment les Maristes ont perçu les événements dans lesquels ils prirent part et dont ils furent témoins.
Au cœur du Pacifique central, deux têtes d'épingles insulaires sont à peine détectables, Wallis (ou Uvéa) et Futuna, 220 km2 au total et 20 000 habitants aujourd'hui. Au 19e siècle, les deux îles servent d'escales mineures pour l'aiguade et le recrutement de marins ; après 1860, le cocotier s'impose, produit roi du Pacifique Sud. Les compétitions apparaissent, religieuses car opposant teachers protestants et papistes français ; géopolitiques avec le traditionnel antagonisme colonial franco-britannique, mais compliqué par l'arrivée de concurrents allemands et américains. Grâce à ses missions maristes, la France y installe, à titre de précaution, son protectorat en 1888. La fin de l'ère prospère du cocotier place, à partir de 1936, les îles face au problème de leur survie future. Implicitement le seul choix possible se fait : l'intégration à la prospère Nouvelle-Calédonie et la prise en charge sur le budget national. À partir de 1960, Wallis et Futuna s'arriment à Nouméa ; une forte migration s'y développe, s'insère lentement à la vie urbaine et aux activités tertiaires et industrielles. En 1990, les Wallisiens et Futuniens sont plus nombreux en Nouvelle-Calédonie que dans l'archipel d'origine. Le poids électoral qu'ils prennent alors dans le contexte de la revendication indépendantiste canaque devient déterminant. Ce modèle wallisien-futunien est déclinable à de nombreuses îles du Pacifique Sud, partageant les mêmes problématiques aiguës : accumulation, surpopulation, équilibre écologique menacé, remise en cause de fortes migrations greffées conjoncturellement sur des milieux en crise.