L'histoire du chantier de restauration entre 1830 et 1914, en particulier celle de ses pratiques, reste encore à écrire. Les sources, tant archivistiques qu'archéologiques, sont profuses dans le domaine. Elles éclairent sur les procédés techniques et les savoir-faire des métiers (du gros-œuvre comme du second-œuvre) ainsi que sur l'organisation et la vie des chantiers. L'ambition de ce volume est de proposer une première approche de cette documentation. Les contributions réunies – études de cas, monographies ou essais – interrogent les stratégies d'approvisionnement en matériaux, l'évolution des procédés techniques de façonnage et de mise en œuvre, de même que les enjeux humains, économiques, sociaux, sociologiques et idéologiques qui motivèrent ces usages. Sous ce nouvel éclairage, le chantier de restauration révèle une matière inédite susceptible de relativiser nos acquis.
En livrant des échos des dialogues, échanges, disputes savantes entre Louis Grodecki et ses correspondants, le millier de lettres colligées dans ce recueil – et ce n'est qu'une petite part d'un ensemble monumental – ouvre de plain-pied sur la fabrique de l'histoire de l'art médiéval et les débats qui l'animent en Europe et en Amérique, entre 1933 et 1980.Les lettres rassemblées ici viennent de ou sont adressées à Henri Focillon, André Chastel, Hélène ou Jurgis Baltrušaitis, Erwin Panofsky, Willibald Sauerländer, Louis Massignon jusqu'à Roland Recht ou Xavier Baral y Altet. Elles donnent à lire les discussions qui se sont tramées entre plusieurs générations de chercheurs en quête de vérités et de méthodes. Toujours denses, rigoureusement structurées, elles sont une part majeure de la production littéraire de Louis Grodecki et livrent un aperçu du temps et du sérieux mis dans cet exercice par les derniers épistoliers du xxe siècle.
Au moment où les historiens de l'art réhabilitent l'architecture de la fin du Moyen Âge, nous avons souhaité rééditer l'ouvrage pionnier consacré par Roland Sanfaçon en 1971 à L'Architecture flamboyante en France. Notre motivation se fonde sur l'appel encore incontournable à son contenu, sur l'absence d'une synthèse française équivalente et, enfin, sur la nécessité de faire de cet ouvrage un objet de réflexion historiographique et épistémologique.Plusieurs auteurs se sont ainsi réunis autour de cette réédition pour évaluer leur dette envers la réflexion prodromique engagée par l'historien québécois sur l'architecture des XVe et XVIe siècles. Tout en interrogeant la problématique élaborée par l'auteur en son temps, forts d'un nouvel "outillage mental", ils écrivent les premières lignes d'une réflexion critique sur une architecture encore méconnue.
"Qu'est-ce que l'architecture gothique?" Les essais rassemblés dans ce volume offrent des réponses inédites à cette question. Le singulier employé pour la formuler est volontaire. Il n'occulte pas la réalité d'une multiplicité d'architectures gothiques résultant de la longévité de son expression (XIIe-XVIe s.), de la mutation constante des formes et des techniques comme de la disparité des foyers culturels, des milieux géographiques, des structures sociales et des rythmes historiques.Au contraire, l'ambition de la question ainsi formulée est celle du croisement. En sollicitant, pour y répondre, un panel de spécialistes investiguant les gothiques des quatre pôles du domaine européen, il s'agit de permettre aux lecteurs d'identifier les lieux communs et de laisser apparaître les permanences gothiques à travers les âges et les milieux.Ce volume propose ainsi des interprétations, soulève des hypothèses et suggère de nouvelles visions.
Le château de Pierrefonds, restauré par l'architecte Viollet-le-Duc à la demande de Napoléon III, est l'un des chantiers les plus prestigieux de la seconde moitié du XIXe siècle. L'abondance des sources permet d'en relater l'histoire en décrivant les hommes du bâtiment, ceux de la pierre (tailleurs, bardeurs, appareilleurs, sculpteurs), du métal (serruriers, plombiers, couvreurs), du bois (charpentiers, menuisiers) et de la couleur (peintres).L'ouvrage s'attache également à définir la place de Viollet-le-Duc, son rôle, ses méthodes, ses rapports avec le commanditaire, avec les artisans et ses collaborateurs directs (inspecteurs, entrepreneurs, vérificateurs).L'objectif est donc d'analyser le processus de restauration dans ses choix pratiques comme dans ses orientations technologiques et d'apprécier comment la culture matérielle du chantier façonne la mémoire et l'identité collective d'un groupe.
L'activité d'architecte-bâtisseur contemporain de Viollet-le-Duc est souvent occultée par son action de restaurateur du patrimoine médiéval. Les chantiers, les projets et les écrits à ce sujet sont pourtant prolifiques, ce qui justifie pleinement une réflexion renouvelée sur ses travaux.De ses chantiers à ses projets avortés, de ses théories à la transmission de ses enseignements en la matière, cet ouvrage présente l'apport de Viollet-le-Duc à l'architecture domestique, à l'habitation de son temps, par le biais de treize contributions inédites abordant un aspect souvent oublié de son œuvre. Enrichissant la connaissance de l'architecture civile du XIXe siècle, cette réflexion dépasse les problématiques esthétiques pour faire valoir son esprit réformateur et témoigne définitivement, et contrairement à ce que ses restaurations diocésaines laissent présager, de ses préoccupations modernes et de son ancrage dans la société contemporaine.
En 1975, Jacques Thiébaut soutenait une thèse sur La cathédrale disparue de Cambrai et sa place dans l'évolution de l'architecture du Nord de la France. Sans mention de siècle non plus que de style, le titre de cette étude, bien que classique dans sa forme monographique, nous invite à cheminer librement à travers les lieux, les âges et les formes. L'auteur fait en effet une enquête qui ne plie pas sous le poids du monument. Au contraire, dégagé des contingences matérielles communes à ce type d'étude, il réussit à prendre le lecteur par la main ; de l'occident à l'orient il lui fait parcourir cette cathédrale détruite en l'analysant chronologiquement depuis sa tour de façade, sa nef et son transept du XIIe siècle, jusqu'à son chevet du XIIIe siècle. C'est ainsi qu'il redessine peu à peu le monument, restaure ses formes, imagine ses espaces, évalue la densité de sa luminance et, pour finir, en sollicitant l'imagination de ses lecteurs, reconstruit l'une des cathédrales majeure de la période gothique.
Construire et restaurer la cathédrale (XIe - XXIe s.)
" Construire et restaurer " sont les actions qui suscitent et régénèrent la cathédrale de Chartres du XIe au XXIe s. Sa stratigraphie est ainsi faite de traces, de marques et d'empreintes appartenant à des passés plus ou moins lointains. Ce sont ces temps enregistrés dans la matière par la main et l'outil que cet ouvrage propose d'investir.Abordée de la sorte la cathédrale dévoile la culture matérielle des bâtisseurs et leur recours à des choix technologiques signifiants. En élargissant l'étude aux restaurateurs apparaissent des individus qui, subordonnés au bâti, reproduisent les gestes et les savoir-faire de leurs lointains prédécesseurs. Ainsi étudiée dans sa matérialité diachronique, la cathédrale de Chartres permet de comparer les hommes et d'apprécier la transmission comme le transfert intergénérationnel des techniques.Dès lors se dévoilent ductus et habitus des tailleurs de pierre, des plombiers, des forgerons, des peintres et des maçons sur le long temps d'un lieu performant : le monument en chantier.
Viollet-le-Duc n'est guère abordé dans son travail de praticien. C'est cet aspect que ce volume propose de dévoiler à travers les monuments bourguignons restaurés et construits par l'architecte entre 1840 et 1879.L'enquête a été menée sur le fondement d'une riche documentation (lettres et rapports) destinée aux membres de la commission des Monuments historiques ou aux inspecteurs qui représentent l'architecte sur des chantiers aussi divers qu'Autun, Montréal, Saulieu, Sens ou Vézelay.La lecture de ces textes publiés en annexe permet de pénétrer l'intimité des travaux et d'aborder les orientations données par Viollet-le-Duc dans le dessein anthropologique de reconstituer les gestes, les techniques, les traces et les marques du chantier médiéval. Ces documents dévoilent également les raisons qui ont présidé au choix des carrières et des essences de bois. Ils nous autorisent par ailleurs à réévaluer la place du métal (fer, plomb) et à apprécier l'emploi des matériaux modernes (fonte, zinc) comme celui de techniques novatrices (estampage, silicatisation, pigmentation de l'appareil).Il est ainsi possible de cerner les critères archéologiques, économiques, architectoniques et esthétiques définis par Viollet-le-Duc pendant quarante ans de carrière et de remettre avec plus de justesse l'homme au cœur de son élément : le chantier.