Les libraires du Comptoir vous proposent des sélections thématiques. À l'approche du 8 mars, le féminin est mis à l'honneur.
Célébrée tous les ans le 8 mars, la Journée internationale des droits des femmes a été officialisée en 1977, suite aux manifestations féminines du début du XXe siècle en Europe et aux États-Unis pour l'égalité des droits, de meilleures conditions de travail et le droit de vote. Cette année, elle aura pour thème "Pour TOUTES les femmes et les filles : droits, égalité et autonomisation".
Qu'est-ce qu'une éducation féministe ?, Vanina Mozziconacci (Éditions de la Sorbonne)
À l'heure où la défense des "éducations à l'égalité" semble plus audible et plus urgente et où les polémiques autour de la "théorie du genre" à l'école dramatisent la nécessité de se positionner en tant que féministe sur le terrain éducatif, cet ouvrage constitue une rupture épistémologique avec des impératifs tactiques qui semblent s'imposer d'eux-mêmes. En refusant de considérer qu'il va de soi que l'éducation est une modalité de la lutte féministe, l'autrice se propose de faire un pas de côté afin de mener un travail de clarification conceptuelle. Il s'agit ici de suspendre le postulat selon lequel l'éducation serait une évidence féministe pour laquelle les seules questions qui persistent seraient d'ordre technique, et se réduiraient au "comment faire?", afin de revenir à une interrogation plus fondamentale, celle du "pourquoi faire?". En effet, si l'éducation est bien omniprésente historiquement dans les revendications féministes, sa place mérite d'être problématisée philosophiquement. Alors même que le féminisme connaît de nombreuses transformations et variations, l'éducation en est une constante historique, et c'est précisément pour cela qu'elle mérite d'être étudiée de façon critique: la forte persistance de cette tradition jette en effet un soupçon sur sa consistance théorique et politique. De l'éducation conçue comme un droit auquel les femmes devraient également avoir accès jusqu'aux institutions éducatives utopiques qui subvertissent la frontière entre privé et public, en passant par la coéducation, la sororité émancipatrice et les pédagogies féministes, cette recherche vise à mettre en lumière les partis-pris épistémologiques, les dialectiques et les tensions qui traversent la conceptualisation de l'éducation au prisme des féminismes.
Le Spéculum, la canule et le miroir, Lucile Ruault (ENS Éditions)
La promulgation de la loi relative à l'IVG en 1975 est un retournement majeur dans l'histoire des femmes : l'État parvient enfin à réguler la pratique abortive. Faisant de l'acte une prérogative exclusive des médecins, la "loi Veil" est un retour à l'ordre. Elle referme une phase d'appropriation revendiquée des savoirs abortifs par des femmes ordinaires. Comment expliquer que, à un moment de l'histoire où la maîtrise de l'avortement par le groupe social des femmes est à portée de main, cette possibilité tourne si rapidement court ? Pour élucider cette énigme, Lucile Ruault s'intéresse au Mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception (MLAC), et en particulier à l'action insoupçonnée de groupes dissidents ayant poursuivi la pratique des aspirations abortives jusqu'en 1984. En montrant que la constitution de l'avortement en question sanitaire a été l'enjeu de conflits, cette ethnographie historique tient ensemble la médicalisation de l'avortement et les résistances à ce processus par la pratique abortive profane, dans un sens féministe.
Voix de femmes, Christine Hivet (Éditions Rue d'Ulm)
Le roman féminin anglais des années 1790-1820 offre un vaste panorama de la condition féminine vue par les femmes, panorama révélateur des aspirations des unes et des craintes des autres. Cet ouvrage offre une relecture de grandes romancières comme Ann Radcliffe ou Jane Austen et une réévaluation de multiples auteurs féminins dits "secondaires".
Féminisme(s) et droit public, Mélanie Dubuy, Pascaline Motsch et Johanna Noel (Presses universitaires de Nancy - Editions Universitaires de Lorraine)
Par l'adoption d'un titre aux allures intrigantes – Féminisme(s) et droit public – cet ouvrage s'analyse de suite comme une volonté de dépasser le lien a priori ténu entre les deux concepts ; le droit n'est pas indifférent aux femmes, sujets du droit et sujets de droits. Au cœur même des théories et des mobilisations féministes, le droit est pensé dialectiquement comme un instrument d'oppression et de domination des femmes dans les sociétés politiques patriarcales mais aussi comme le levier imparable de leur émancipation. Questionner ainsi la condition juridique des femmes en France, en Europe et dans le monde revêt un réel intérêt tant théorique que pratique. Cet ouvrage propose ainsi différentes lectures pouvant intéresser le juriste, le politiste mais aussi tout simplement le citoyen concerné et intéressé par une question sociétale désormais incontournable. Tentant de comprendre l'essence plurielle du féminisme (dès lors des féminismes), cherchant à dévoiler leurs réceptions par les juridictions nationales, supranationales mais aussi par différents ordres juridiques, ces contributions dressent certains états des lieux afin de poursuivre les recherches sur un thème médiatiquement exposé, même si scientifiquement peu exploité, notamment en France. Si chaque lecteur garde discrétionnairement le soin de tisser sa propre vision des liens entre féminisme(s) et droit public, celui-ci, spécialiste ou profane, pourra néanmoins trouver à travers ces onze contributions des éléments de réponse à certaines questions désormais cruciales pour appréhender de manière normative les femmes et les théories féministes.
Nouvelles Questions Féministes, vol. 43(2)/2024, Collectif (Éditions Antipodes)
Que font nos institutions publiques pour véritablement lutter contre les violences patriarcales ? Pourquoi des femmes meurent-elles de féminicides alors qu'elles avaient alerté la police de la violence de leur conjoint ? Pourquoi les agressions sexuelles sont-elles si répandues, si banales et si peu sanctionnées par la Justice ? Il faut bien constater que les politiques publiques ne sont pas à la hauteur des enjeux et de nos légitimes attentes. L'indignation face à cette situation a déclenché une vaste mobilisation féministe, à l'échelle mondiale, qui a abouti en ce début des années 2020 à l'obtention de nouvelles mesures, que les articles réunis dans ce numéro ont décidé d'examiner avec minutie. Au Chili, des Centres d'accueil pour victimes de violences sexuelles ont été mis en place. En France, Le Téléphone Grave Danger et les bracelets anti-rapprochement ont été adoptés pour protéger les victimes de violences conjugales, tandis que des cellules d'écoute ont été mises sur pied dans les universités pour accompagner les victimes de harcèlement sexuel. Ces dispositifs sont-ils efficaces et apportent-ils les réponses espérées ? L'analyse critique menée par ces équipes de recherche témoigne de certaines avancées, mais aussi des obstacles qu'il reste à surmonter.
L'Art est une arme de combat féministe, Samantha Faubert et Fanny Jedlicki (Presses universitaires de Rouen et du Havre)
Que signifie la pratique artistique féminine, professionnelle et amateure ? C'est la question à laquelle s'efforce de répondre ce volume en faisant appel à des disciplines multiples et en étudiant des contextes historico-politiques et des aires géographiques contrastés. La domination masculine, et ses formes aigües de violence contre les femmes, engage en effet l'acte créateur féminin, qu'il soit sciemment féministe ou non, dans la voie de la subversion et de l'émancipation. Militantes MLF, Femen, ancienne guerillera salvadorienne ou encore artistes reconnues s'élèvent également contre les systèmes d'oppression économique et racialiste. C'est ainsi que les arts plastiques, le cinéma (de fiction et documentaire), la danse, la poésie ou encore le théâtre de Jacqueline Audry, Gioconda Belli Griselda Gambaro, Ana Istarú, Maggie Hadleigh-West, Rokhsareh Ghaem Maghami, Sarah Maldoror, Silvia Ethel Matus Avelar, Sofie Peeters, Ana María Rodas Shoshana Roberts, Clementina Suárez et Nil Yalter, constituent une véritable arme de combat.
Féminismes et artivisme dans les Amériques (XXe-XXIe siècles), Lissell Quiroz (Presses universitaires de Rouen et du Havre)
"Y la culpa no era mía, ni dónde estaba, ni cómo vestía", chantaient des femmes aux yeux bandés dans différentes villes d'Amérique latine en novembre 2019. Cette performance créée par le collectif féministe Las Tesis, a fait le tour du monde. Elle montre la force et la vitalité de l'artivisme dans les Amériques. En 2017, un colloque intitulé "Féminismes et Artivisme dans les Amériques (20e-21e siècles) s'est tenu à l'Université de Rouen et a proposé différentes analyses sur cette thématique. Ce volume monographique est le résultat de cette réflexion collective. Il s'intéresse à la diversité des théorisations et des mobilisations féministes du continent américain, très dynamiques historiquement et de plus en plus visibles depuis la fin du 20e siècle. Le féminisme des Amériques est pluriel et possède une généalogie propre. Ce volume s'attache à décliner ses différentes formes, à savoir, chicano, décolonial, lesbien, queer, entre autres. L'originalité des actions féministes de la région provient de la mobilisation politique de genres artistiques, qu'ils soient musicaux (rap, reggaeton), picturaux ou des arts visuels. Cet artivisme joue ainsi un rôle central dans les formes d'action du continent et ce volume présente leur diversité, leur richesse et leur force créatrice et politique.
Lors de chaque événement de notre programmation, nos libraires vous accueillent au Comptoir, au 1er étage de la Fondation Maison des Sciences de l'Homme, 54 Boulevard Raspail - Paris 6.